Saint-Barthélemy ne sort pas de la crise du logement, qui n’épargne ni les particuliers ni les entreprises. Les propriétaires sont submergés d’appels, les enchères montent, et certains sont contraints de quitter l’île.
« Maintenant, quand je reçois un CV, avant de regarder les compétences, je regarde si la personne est logée », confie la recruteuse d’un hôtel. Ce témoignage en dit long : même les entreprises ont du mal à trouver de quoi loger leur personnel. Ce ne sont plus seulement les derniers arrivés sur l’île mais des habitants installés qui sont en recherche active. Sur les réseaux sociaux, ils alignent leurs arguments : « Je suis le directeur général d’AMC », « Enseignante à l’école élémentaire », « Si nous ne trouvons pas nous serons contraints de fermer la boutique »…
« Actuellement je suis logée par mon employeur, mais c’est provisoire », explique Hélène, arrivée en octobre dernier sur l’île pour travailler. « Mon patron cherche pour lui aussi. Mon contrat se termine fin avril ; il est prévu que je reprenne le travail en juillet, mais seulement si je trouve un logement. Sinon je ne pourrai pas revenir », regrette la jeune femme. Julie, employée d’une boutique à Gustavia, loge chez une amie depuis Irma : l’ouragan a détruit sa précédente habitation. « C’était déjà compliqué de trouver un logement avant Irma, et ça l’est encore plus depuis… »
« Soit on trouve, soit on s’en va »
« Mon propriétaire m’a appelé ce matin, il n’a plus le choix et doit récupérer la maison dans laquelle je loge », raconte Valérie. Résidente depuis 28 ans, « ce n’est pas la première fois que je recherche, mais c’est très compliqué, les logements sont très chers… Après Luis, déjà, les prix étaient montés en flèche. Je me doutais que ce serait la même chose avec Irma. J’ai déjà cherché auparavant, j’avais mis je ne sais combien d’annonce, si j’ai reçu trois coups de fil dans l’année, c’est bien le maximum. » Son budget : 2.000 euros mensuels, pour un logement qu’elle partagera avec son fils de 30 ans. « Ma situation était déjà précaire, je vivais dans une maison une chambre avec mon fils. A un moment, les parents et enfants ne sont plus faits pour vivre ensemble. » Valérie sollicite toutes ses connaissances dans l’espoir de dénicher quelque chose. Le jeune couple que forment Swan et Loan se retrouve installé chez papa et maman depuis le cyclone. « On cherche depuis trois mois, et aucune piste en vue », s’inquiète la jeune femme. « Un logement deux chambres, c’est 3.000 euros. Il faut arriver à les sortir quand on est jeunes ! Je suis ici depuis ma naissance, mon copain depuis son plus jeune âge. Depuis Irma, on est passés par une villa cyclonée, un studio avec ses parents… Ça commence à être pesant d’être à droite et à gauche. »
Le délai de remboursement des assurances rajoute encore de la difficulté. Certains propriétaires attendent toujours leur indemnisation pour lancer les travaux. « Ça fait 7 ans et demi que je suis sur l’île, on cherche une solution logement en attendant la reconstruction de celui qu’on louait depuis Irma. Reconstruction qui n’a toujours pas commencé ! Ils attendent les sous de l’assurance, mais c’est une copropriété donc c’est long », explique Virginie. Jeune maman, elle avait trouvé un logement pour son retour sur l’île avec le nouveau-né. « Lorsque nous sommes arrivés à l’appartement, le proprio a dit : « Ah mais je ne savais pas que vous aviez un bébé ! Je ne veux pas de chat pas de bébé » ! C’est hyper choquant, ils mettent les animaux et les enfants dans le même sac, ça m’a rendue très triste ». « Ce n’est pas très agréable de se savoir sans toit. Soit on trouve, soit on s’en va », résume Valérie. « Mais j’ai toute ma vie ici, mon travail, mes amis. Je ne sais pas comment on pourrait résoudre ce problème de logement… »
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