Lors d’une réunion publique organisée le lundi 8 avril, des habitants du quartier de Public ont exprimé leur exaspération vis-à-vis des
nuisances sonores et des rejets de poussières venues de la zones industrielles. Une pollution qui suscite des inquiétudes quant à leur état de santé.
La rencontre organisée le lundi 8 avril dans les locaux de l’association pour la sauvegarde du quartier de Public (ASP) est annoncée comme une simple réunion de quartier. En réalité, il s’agit davantage d’une réunion d’urgence. Car les habitants ne supportent plus leur environnement et souhaitent le faire savoir. Aussi, aux référents de quartier Aïthana Aubert et Divin Turbé se sont joints le président de la Collectivité territoriale, Xavier Lédée, et sa troisième vice-présidente, Marie-Angèle Aubin.
« Ça dure depuis des années »
Plus que leur environnement direct, c’est l’atmosphère qui est devenue irrespirable pour les habitants de Public. Ils sont 25 à avoir investi la petite salle de l’ASP pour exprimer leur exaspération et leurs inquiétudes. « Nous avons deux gros problèmes, résume une femme. Les nuisances sonores et les poussières du broyeur. Nous avons des petits dans le quartier, et d’autres qui vont naître. Il faut qu’ils aient de bonnes conditions de vie. » Une autre habitante complète : « Ça dure depuis des années. Elles passent et les problèmes s’accumulent. » Le premier qui est mentionné est celui du bruit constant qui remonte depuis la zone industrielle.
« La centrale EDF fait de plus en plus de bruit », constate un homme. Sa voisine confirme : « J’ai l’impression que c’est de plus en plus fort et de plus en plus régulier depuis la mise en place de la nouvelle usine. » Le président Lédée s’efforce d’apporter des explications.
Il évoque notamment la délibération votée par le conseil territorial qui impose des normes spécifiques sur les moteurs Aggreko (groupes électrogènes) de la centrale, comme la pose d’éléments destinés à atténuer leurs émissions de bruits. « Mais les travaux n’ont pas encore été finalisés », précise l’élu.
Des normes imposées trop tolérantes
Quand Marie-Angèle Aubin souligne l’importance du respect de la règlementation du code de l’environnement, un habitant réplique : « Le problème est que le code de l’environnement autorise de produire huit décibels de plus par rapport aux normes françaises. » Divin Turbé, référent de quartier mais aussi technicien pour EDF, ajoute : « Sur tous les territoires d’outre-mer, les mêmes normes qu’en métropole sont appliquées. Il n’y a qu’à Saint-Barth que l’on a accepté qu’il y ait plus de bruit. Dans la centrale de Guadeloupe, il est impossible de savoir quel moteur tourne tellement il n’y a pas de bruit… » Et une habitante de remarquer : « C’est un bruit sourd, à basse fréquence. Du coup vous pouvez tout fermer, ça ne change rien. C’est du H24 et il y avait déjà beaucoup de bruit avant les Aggreko. Il faut mettre en place des choses pour que ça s’arrête. » Le bruit, comme les fumées qui ne sont pas traitées avant d’être rejetées. « Saint-Barth est la seule île française où ce n’est pas fait», glisse un intervenant.
Paprec, ses poussières et ses bruits
Après EDF et sa centrale, les reproches se portent sur l’usine de traitement des déchets de Paprec. Moins pour le bruit, bien qu’il soit également pesant, que pour les émissions de poussières. «Paprec nous dit depuis des mois qu’ils vont sécuriser le site, assure Xavier Lédée. Il existe un système de brumisation mais on est en train de mettre en place des choses pour définir des normes. S’il le faut, la Collectivité prendra les choses en main. »
A la question de savoir si la Collectivité a les moyens pour faire respecter son code de l’environnement, le président répond : « Même si le code doit être amélioré, des règles doivent déjà être respectées. Des tests sur le bruit et des audits ont déjà été faits sur les délégations de services publics. On recherche des solutions pour palier à des problèmes qui durent depuis longtemps. »
« Ça devient impossible de vivre à Public »
En mai, Marie-Angèle Aubin annonce la venue sur l’île d’agents de la DEAL (Direction de l'environnement, de l'aménagement et du logement) pour effectuer des contrôles au sein de toutes les installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE). Pendant les quinze jours qui précèderont leur arrivée, des capteurs vont être disposés sur différentes zones de ces installations. « Pour qu’ils aient de la matière dès qu’ils arriveront », souligne la 3e vice-présidente. « Normalement, vous devez demander des relevés tous les ans, est-ce que vous avez les données ? », demande un habitant. Marie-Angèle Aubin déclare que « Paprec a fait les contrôles » et que ceux-ci montrent que l’usine émet un bruit de « deux décibels au-dessus de la limite autorisée». Toutefois, l’élue précise : « Je n’ai pas le rapport. »
Concernant les émissions de poussières, le président Lédée affirme que la Collectivité « fera ce que Paprec n’a pas fait, installer une bâche ». Sur les poussières, un habitant rappelle que l’usine à béton devrait également faire l’objet de mesures.
Lors de cette réunion, d’autres préoccupations sont mentionnées : les bruits des hélicoptères qui attendent leur atterrissage en phase géostationnaire, mais aussi le stationnement sauvage. Particulièrement le long des voies d’accès à la plage de Public. Pour finir, une femme résume la situation dans le quartier : « Je suis née à Public. Je fréquente Public. Ça devient impossible de vivre à Public. » Un constat basé sur un ressenti mais qui pourrait se muer en prédiction si l’atmosphère ne s’éclaircit pas rapidement. Au propre comme au figuré. Pour cela, la solidarité et l’engagement des habitants ne suffiront pas.