En septembre, la rentrée des écoles et du collège a été mouvementée. Le rectorat peine pour recruter et les enseignants en place galèrent à se loger. La situation est en passe de se régler… pour cette année.
Des enseignants, il y en aurait s’il y avait des logements », lâche tout de go Dominique Boyer, inspecteur du 1er degré pour Saint-Barth et Saint-Martin. « De temps en temps, certains demandent des mutations vers Saint-Barth sans trop savoir. Cette année, on avait une enseignante dans ce cas, avec deux enfants, qui finalement n’est même pas venue. Deux autres ont jeté l’éponge… »
Il manque donc trois postes pour les écoles primaire et maternelle publiques : deux remplaçants en cas d’arrêts maladie, et un poste de décharge pour les deux directrices. C’est à dire une personne qui remplace Micheline Jacques et Sylvie Pollien dans leurs classes quand elles exercent leur mission de directrices. « La personne nommée est repartie aussi », informe Dominique Boyer. Mardi, il a rencontré six candidats à Saint-Barthélemy, qui ont postulé à des annonces publiées sur l’île. « La validation du rectorat est encore nécessaire, mais on devrait avoir les trois personnes dans les jours qui viennent. »
Au collège, où il manquait cinq professeurs le jour de la rentrée scolaire, « tous nos profs sont arrivés, ainsi que le personnel de vie scolaire. La difficulté du logement s’est posée, mais la dernière personne est parvenue à trouver d’elle-même une solution », indique le principal adjoint.
A l’école primaire, une enseignante a dû partir au début de l’année. Logée par la Collectivité quelques temps, elle n’a pu trouver d’appartement pour elle et ses enfants et a été mutée en Guadeloupe. « Sachant son intention de partir, on avait mis quelqu’un sur sa classe », explique Micheline Jacques, directrice de l’école. Depuis la rentrée, chaque classe a son enseignant, sauf en cas de maladie puisqu’il n’y a pas de remplaçant à ce jour. « Dans ce cas, on répartit les enfants dans les autres classes. »
A l’école maternelle, une enseignante avait épuisé toutes les solutions, ne parvenant pas à se loger avec ses deux enfants. En poste depuis plusieurs années, elle craignait de devoir quitter l’île. A la dernière minute, la Collectivité est parvenue à lui fournir un appartement pour une durée de six mois. D’ici là, il faudra qu’elle trouve quelque chose. Une autre institutrice était aussi sur la sellette de son hébergement, un parent d’élève lui a trouvé une solution.
Quelles solutions à long terme ?
Tout est donc à peu près bon pour l’année scolaire en cours. Mais comment travailler sereinement avec une telle instabilité, que ce soit pour les enseignants ou les encadrants ? Les pistes de solutions sont maigres. Interrogé sur le sujet lors de la visite d’Emmanuel Macron, Bruno Magras avait suggéré d’encourager les Saint-Barth à se former.
Du côté du rectorat, on comprend la complexité de la situation. « Dire « il faut que la Collectivité fournisse des logements aux profs », c’est un peu simpliste », explique Dominique Boyer. « Je ne crois pas qu’il y ait une solution miracle. » Car même si elle y mettait les importants moyens nécessaires, la Collectivité ne peut pas favoriser à ce point les enseignants, si utiles soient-ils à la bonne marche de la société. Que répondre à l’indispensable personnel médical, entre autres, dans ce cas ? Sans parler des fonctionnaires déjà en poste depuis plusieurs années, qui en ont bavé pour réussir à faire leur nid à Saint-Barthélemy, et verraient peut être d’un mauvais œil que cela tombe tout cuit pour les nouveaux arrivants… La Collectivité a donc pris le partie de dépanner les cas d’urgence, et d’assister au mieux les enseignants dans leurs recherches.
Parce qu’outre la rareté des logements à Saint-Barth, leur prix font aussi obstacle aux personnels de l’éducation nationale. Les fonctionnaires, avec la majoration outre-mer de 40%, travaillent pour un salaire d’environ 2.400 euros nets, plus quelques primes. Pour un contractuel, le montant oscille entre 1.800 et 2.000 euros. Pas mal payé, mais 2.000 euros, c’est le prix de la location mensuelle d’une petite maison…
La Collectivité héberge par exemple des enseignants dans son logement de Shell Beach, mais il faut y vivre en colocation, ce à quoi tout le monde n’est pas forcément prêt. « L’an dernier, j’ai deux institutrices qui ont dormi dans le même lit ! », avoue Dominique Boyer. Il adapte de plus en plus ses recrutements pour trouver des profils qui supporteront ce mode de vie. « Pour tout le reste, les conditions sont idéales, que ce soit l’infrastructure, le matériel, l’argent mis dans les écoles, la climatisation dans les classes… C’est le top. Nous n’avons que ce souci. Et peut-être que si nous ne l’avions pas, les enseignants ne voudraient plus du tout bouger de Saint-Barth… » Pas certain, car dans l’académie, Saint-Barthélemy et Saint-Martin ont toujours été moins attractives que la Guadeloupe. Encore plus depuis Irma.
« La seule critique que je pourrais faire, c’est envers certains propriétaires. Pour moi, la solution vient d’eux », poursuit Dominique Boyer, qui se saisit de l’occasion pour les encourager : « Louer à un fonctionnaire, c’est quand même une vraie garantie. Et c’est pour le bien de l’île ! »
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