Conférence de presse vendredi dernier en présence de la préfète pour l’ouverture de la saison cyclonique. Avec un mot d’ordre à l’attention des habitants : ne pas attendre le dernier moment pour se préparer.
Sous l’égide de la préfète de Saint-Martin et Saint-Barthélemy Sylvie Feucher et de la première vice-présidente Nicole Gréaux, une conférence de presse s’est tenue vendredi à l’hôtel de la Collectivité en prévision de la saison cyclonique 2019. « Irma a été un événement exceptionnel dont on doit tirer les leçons », indique en préambule la préfète, qui rappelle que les alertes Isaac et Beryl de l’an dernier, si elles ont été surévaluées, ont eu l’avantage de faire office d’exercice. « Il ne s’agit pas de donner des leçons aux Saint-Barths, qui savent se protéger. Mais l’important est de se préparer à chaque fois comme si le pire allait arriver, afin de mettre de l’huile dans les rouages. » « Il n’y a pas de petit phénomène, Gonzalo nous l’a prouvé », ajoute Nicole Gréaux.
> Organisation affinée
L’espace Météo, bien qu’ayant été défoncé par l’ouragan Irma, accueillera de nouveau le COT (centre opérationnel territorial) en cas de phénomène cyclonique. Reconstruit et renforcé, le bâtiment abritera l’équipe qui travaillera en lien avec le COD de Saint-Martin et le centre de gestion de crise de Paris.
> Communications difficiles
Communication impossible entre les décisionnaires du territoire : après Irma, ce blanc a entraîné de nombreuses problématiques, particulièrement à Saint-Martin mais chez nous également. Du matériel satellite et radio supplémentaire a été mis en place pour que les autorités et services de secours puissent rester en lien. Si les décisionnaires devraient pouvoir communiquer en toute circonstance, ce n’est pas le cas des habitants. « Je ne voudrais pas être le chat noir... », prévient Clémenceau Magras, ex-chef de la sécurité civile qui malgré la retraite continue d’apporter son concours à la préparation de la saison. «Lurin TDF, c’est un cerisier tellement il y a d’antennes dessus. Ce sera comme ça tant que l’on aura pas trouvé un compromis avec les propriétaires voisins, qui ne veulent pas de nouvelle antenne. A Toiny, il n’y a plus d’antenne, et à Colombier, disons qu’elle tient par habitude… » Restent les deux câbles sous marins qui passent sous Shell Beach. « On reste assez fragiles. Au cas ou, on a réceptionné un pylône téléscopique de 15 mètres, ainsi qu’un second de huit mètres qui pourra remplacer l’antenne de Colombier si elle tombe. » A plus long terme, « pour la fibre optique, on aura bien avancé d’ici deux ou trois ans», ajoute Thierry Aron, directeur de cabinet du Président.
> Déchets, le point sensible
Dès à présent, les habitants sont invités à débarrasser leurs terrains et jardins des déchets ou objets qui pourraient se transformer en projectiles. Pour les encombrants et autres feuilles de tôles restées là depuis Irma, les services de la Collectivité proposent une assistance à l’enlèvement. Même si l’on est qu’au mois de juin, mieux vaut s’occuper de cela maintenant, afin de ne pas saturer le site de propreté à la veille d’un cyclone. « En faisant un tour de l’île il y a quelques jours, j’ai constaté qu’il existait de nombreux dépôts de chantier, potentiellement très dangereux », s’inquiète Nicole Gréaux.
Clémenceau Magras souligne que des courriers ont été envoyés à toutes les sociétés de l’île, ainsi qu’aux garagistes, pour les inviter à nettoyer leurs terrains et les prévenir du nécessaire démontage des grues.
Restent les dunes de déchets broyés stockées derrière le centre commercial de Saint-Jean. « C’est un peu le point noir, on n’a pas de visibilité sur leur évacuation », admet Thierry Aron. Ces tas de déchets proviennent des encombrants (mobilier, bois…) jetés en trop grand nombre pour être stockés au site de propreté. Il faudra plusieurs barges pour vider le terrain. Il est fort peu probable qu’il soit nettoyé avant le mois septembre, pic de l’activité cyclonique. « Heureusement ce n’est que du broyat, il n’y a pas de projectiles lourds. »
Par ailleurs, les services techniques pré positionneront leurs engins afin de pouvoir commencer au plus tôt à libérer les axes routiers.
> Eau, denrées, médicaments, carburants
Les deux stations-service de l’île sont dans l’obligation de conserver 5.000 litres de gasoil et de sans-plomb pour assurer l’approvisionnement des secours et services techniques, après le phénomène.
Les commerçants ont reçu un courrier leur rappelant la réglementation sur le respect de la chaîne du froid, qui peut être brisée en cas d’ouragan. « Après Irma, on s’est rendu compte que l’eau potable est ce qui a le plus manqué aux familles », se souvient Nicole Gréaux. « Même les pompiers et les gendarmes ont subi la pénurie. D’ailleurs le stock d’eau des pompiers avait été volé, pour la petite histoire… » « Le meilleur stock, c’est celui que chacun possède à la maison », note Thierry Aron. « Chacun doit aussi prendre ses précautions pour les médicaments, en cas de rupture d’approvisionnement des pharmacies », ajoute Nicole Gréaux. Pour être certain de ne rien oublier, la préfecture met à disposition une “check-list” (voir page de gauche).
> Alerte et évacuation
Pour Nicole Gréaux, « le fait que la préfète ait donné l’ordre d’évacuer les littoraux a probablement sauvé des vies durant l’ouragan Irma ». En cas de phénomène majeur, il sera donc capital de surveiller les niveaux de vigilance et rester à l’écoute des médias. Les forces de l’ordre pourront ajouter au dispositif d’alerte une tournée au mégaphone dans les quartiers, sans oublier les habitants des bateaux.
> Abris sûrs majorés
Leur capacité d’accueil a été augmentée depuis Irma : 200 places sont à disposition dans les abris sûrs de l’île. Ecole primaire de Gustavia, collège, local ALC à Corossol, réfectoire de l’école de Lorient, et pour les grabataires, église évangélique de Gustavia et presbytère de Gustavia. Ces derniers pourront être équipés de matériel médical grâce au concours de CMS, et des infirmières donneront de leur temps pour accompagner les personnes fragiles.
Du côté des résidents de l’Ehpad, en cas d’ouragan majeur, ils pourront être déménagés au sous-sol du bâtiment, dans le parking. En effet, si l’Ehpad a tenu le coup pour Irma, il a quand même été très secoué.
> Postes de secours avancés
Trois postes de secours avancés sont prévus pour traiter les éventuels blessés. L’un sera installé à Lorient, l’autre dans la salle de danse de l’Ascco, à Colombier. Pour finir, une tente militaire conservée au COT sera déployée immédiatement après l’événement, indique le lieutenant des sapeurs pompiers Christophe Laurens, qui souligne que la Croix Rouge prend part à cette organisation en fournissant quantité de matériel.
Enfin, sous la houlette du médecin urgentiste de l’hôpital, les généralistes seront munis d’une radio et des clés des postes de secours afin d’administrer les premiers soins et diriger les habitants, au besoin. Pour éviter la ruée vers l’hôpital connue après Irma, un poste “bobologie” sera ouvert à l’infirmerie du collège, pour les blessures superficielles.
> Gare aux groupes électrogènes
« On a vu beaucoup de personnes s’équiper de groupes électrogènes après l’ouragan Irma. Attention à ne pas ajouter un accident à la crise », met en garde Nicole Gréaux. En cas de mauvaise utilisation, les groupes électrogènes peuvent comporter des risques notamment d’émanations toxiques et d’incendie.
Côté électricité, le programme d’enfouissement des réseaux mené par la Collectivité et EDF court jusqu’en 2021. Attention donc aux poteaux de guinguois restants.
> “Bleuir” le terrain
Le major Michel Vicaire, numéro 2 des gendarmes, assure que les militaires resteront jusqu’au dernier moment à l’extérieur, « pour assurer la sécurité des personnes et des biens. Ensuite la priorité sera de viabiliser les accès de circulation, puis l’assistance et l’aide à la personne. Enfin, il faudra “bleuir le terrain”, afin d’éviter les vols et pillages comme on en a vu, à la marge, après Irma. »
> Les engins des pompiers déménagent
« L’ensemble des véhicules ne restera en aucun cas au centre de secours », tranche le lieutenant Christophe Laurens. En 2017, plusieurs engins avaient été noyés sous la montée de la mer. Ils ont depuis été remplacés par des véhicules flambant neufs. «Nous avons des pistes de réflexions en cours pour les réunir dans un seul endroit sécurisé, afin qu’ils soient opérationnels dès la fin du phénomène. » On ignore où ils seront confinés pour le moment, sachant que le futur parking de la rue de la Paix doit, à terme, les accueillir. Ce sera aussi l’occasion pour les pompiers de tester l’organisation de la réserve de sécurité civile tout juste créée.
JSB 1331