Saint-Barth - Réunion publique santé hôpital

Un hôpital à Saint-Jean ? Une idée qui séduit

S’il s’agissait d’une réunion publique destinée à convaincre la population du bienfondé du projet de construction d’un nouvel hôpital à Saint-Jean, l’objectif a visiblement été atteint. Car au sortir de la capitainerie de Gustavia, mardi 5 novembre en début de soirée, nombreux étaient les participants à avoir été séduits par l’idée de l’implantation d’une nouvelle structure hospitalière au plus près de l’aéroport et de la caserne du Service territorial d’incendie et de secours. Certes, comme l’a répété à plusieurs reprises la première vice-présidente de la Collectivité territoriale, Marie-Hélène Bernier, la construction d’un nouvel établissement n’en est, pour l’heure, qu’au stade de proposition. Mais les avis favorables exprimés par les praticiens de santé et des architectes présents à la réunion ont fini de convaincre une grande partie de la centaine de personnes qui constituait l’auditoire de la pertinence supposée du projet.

Foncier : une procédure en cours
Dans un premier temps, avant d’aborder les enjeux, les avantages et les inconvénients liés à la rénovation de l’hôpital Irénée de Bruyn ou à la construction d’un nouvel établissement, Marie-Hélène Bernier a pris soin d’exposer, dans le détail, le contexte global de l’offre de soin à Saint-Barthélemy. Elle a notamment apporté une réponse à une question que la direction de l’Agence régionale de santé (ARS) a refusé d’aborder avec le JSB. En l’occurrence, celle du foncier de l’hôpital de Bruyn, qui est la propriété du Conseil général de Guadeloupe, et pour laquelle l’ancienne directrice par intérim des établissements de santé de Saint-Barthélemy et Saint-Martin, Anne Calais, a engagé en novembre 2023 une procédure judiciaire contre le Département de Guadeloupe pour « excès de pouvoir ». Pour mémoire, en août 2022 puis en août 2024, le président du Conseil général Guy Losbar s’était engagé à régulariser la rétrocession des terrains à la Collectivité de Saint-Barthélemy. Un dossier qui, pour l’heure, n’a toujours pas été traité.

Évolution du statut ?
La réunion a été l’occasion de rappeler des questions primordiales. Comme celle du statut de l’hôpital qui évolue actuellement dans un système médical partagé avec celui de Saint-Martin dans le cadre d’un groupement hospitalier des territoires (GHT). Dans son étude de faisabilité en vue de l’éventuelle construction d’un nouvel établissement de santé à Saint-Jean, l’AP-HP (Assistance publique – Hôpitaux de Paris) a notamment évoqué la possibilité d’évoluer vers un statut d’établissement de santé privé d’intérêt collectif. Ce qui permettrait à l’hôpital de prendre son autonomie en créant un projet médical autonome avec un nouvel hôpital et une offre de soins élargie. « Il existe un déficit de lisibilité sur le fonctionnement du GHT », a concédé Eric Djamakorzian, le directeur de l’hôpital de Bruyn qui officie également depuis septembre comme directeur par intérim de l’hôpital Fleming de Saint-Martin.

Un hôpital qui ne correspond plus aux exigences réglementaires
Au-delà des questions administratives, ce sont à la fois la vétusté et l’étroitesse de l’actuel hôpital qui posent question. Marie-Hélène Bernier a ainsi souligné le fait que depuis le passage de l’ouragan Irma, en septembre 2017, une partie des bâtiments administratifs de l’hôpital de Bruyn est restée à l’abandon pendant des années et a été rongée par les termites. Elle remarque également le relatif délabrement de certaines zones de l’établissement qui, pour mémoire, a été construit en 1936 avant d’être progressivement modernisé. Sans pour autant obtenir une reconnaissance de la part de la haute autorité de santé. Eric Djamakorzian précise : « Cet hôpital a son charme mais ne correspond plus aux exigences de la réglementation actuelle. » De plus, si le nombre de passages aux urgences reste stable (7.965 en 2014 et 7.781 en 2023), le nombre de consultations avancées est passé de 324 en 2014 à 1.242 en 2023. L’augmentation de la population, désormais estimée à plus de 12.000 habitants, conjuguée à la hausse de la fréquentation touristique de l’île, fait que les capacités de l’hôpital ne sont plus en adéquation avec le public de l’île.
Pour disposer d’un établissement conforme, plus qu’une simple rénovation, il serait nécessaire de détruire les bâtiments actuels de Gustavia pour reconstruire sur le même site. Car, selon l’expertise de plusieurs architectes, les fondations de la structure qui s’étend sur 1.820 mètres carrés ne supporteraient pas des constructions supplémentaires. Par conséquent, pour disposer de plus d’espace, il faudrait détruire et reconstruire. Avec les nuisances qu’un tel chantier pourrait impliquer (circulation de camion, poussière, bruit, etc).

« Prendre le bon virage »
Si Marie-Hélène Bernier évoque « l’attachement émotionnel d’une partie de la population » au site de Gustavia, elle rappelle les difficultés d’accès ainsi que les contraintes de superficie et d’infrastructure. Pour un nouvel hôpital à Saint-Jean, l’élue souligne le positionnement central, la proximité stratégique avec l’aéroport et la caserne du Stis et l’amélioration de l’offre de soin dans un établissement neuf et moderne.
Enfin, la première vice-présidente chargée des questions de santé, également présidente du conseil de surveillance de l’hôpital de Bruyn, a insisté sur le fait que l’hôpital de Saint-Martin affiche un déficit de huit millions d’euros. « Si on ne prend pas le bon virage, Saint-Barth sera confrontée aux mêmes problèmes que Saint-Martin, assure-t-elle. Or, à Saint-Barth, on a des moyens. » Et le directeur Djamakorzian d’appuyer ces propos en déclarant : « Il nous faut une orientation et une position claires dès les prochains mois. » Par conséquent, s’il n’y a pas d’urgence, il semble toutefois que le temps presse. La nuance est ténue, mais perceptible.

Évacuations sanitaires : un volet incontournable

Compte tenu de l’absence de certains services hospitaliers à Saint-Barth, les évacuations sanitaires vers Saint-Martin, la Guadeloupe ou la Martinique sont aussi fréquentes qu’indispensables. Lors de la réunion publique de mardi soir, seule la compagnie Saint-Barth Executive était représentée. Car c’est elle qui a répondu à l’avis de marché lancé par la direction de l’hôpital. Même si plusieurs détails doivent encore être réglés, comme le confirme la publication d’un nouvel avis de marché dans l’édition 1588 du JSB. Quoi qu’il en soit, la compagnie a indiqué avoir opéré 587 « évasan » en 2023. Marie-Hélène Bernier a précisé que le coût d’un transport aérien a évolué de 1.693 euros en 2019 à 2.572 en 2021 pour s’élever désormais, en 2024, à près de 4.000 euros. L’opérateur aérien explique cette évolution par la mise à disposition permanente d’avions, au temps de réaction qui doit être très rapide pour transporter des malades et blessés, mais aussi aux contraintes liées aux différentes réglementations des aéroports de la région. De plus, il rappelle que malgré des demandes répétées auprès de l’Etat, les « évasan » d’urgence comme celles pour actes médicaux ne sont pas prises en charge par la sécurité sociale. C’est donc l’hôpital, avec l’aide de la Collectivité, qui prend en charge les frais d’évacuation. « La difficulté principale à Saint-Barth, ce sont les budgets pour disposer d’un service 24 heures sur 24 », confirme Vincent Beauvarlet, président de Saint-Barth Executive.

 

Journal de Saint-Barth N°1590 du 07/11/2024

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