Le collectif de défense du CHU de Guadeloupe, endommagé par un grave incendie le 28 novembre dernier, dénonce des conditions de travail telles qu’elles auraient entraîné des morts suspectes parmi les patients. Des propos réfutés par les autorités sanitaires.
Une jeune femme qui décède faute de bouteilles d’oxygène disponibles, dix nourrissons morts à cause de problèmes matériels et de cahots sur la route pendant les transferts… La situation au CHU de la Guadeloupe, dressée par nos confrères d’Europe 1, fait froid dans le dos. Pour les trois premiers mois de 2018, quarante-trois décès suspects ont été recensés par le collectif de défense du CHU, fondé par des membres du personnel. Le nombre de patients décédés serait en hausse de 31% par rapport à l’année précédente.
Depuis l’incendie du 28 novembre dernier, il semble que les problèmes s’accumulent. Début mars, le personnel de l’hôpital, soit environ 3.000 personnes, était victime de malaises en série. A tel point qu’une partie de l’infrastructure a été délocalisée. Des dizaines d’employés sont actuellement en arrêt maladie, a priori à cause d’une très mauvaise qualité de l’air. Cinq médecins se sont retrouvés arrêtés en même temps, victimes de différents troubles, notamment neurologiques. Le collectif de défense milite pour vider complètement les lieux tant qu’ils ne seront pas assainis.
« Pas de danger grave et imminent »
La commission médicale du CHU de Guadeloupe a réagi mardi à ce reportage édifiant, en publiant un communiqué de presse : « La communauté soignante continue, en dépit d’un contexte particulièrement défavorable, à assurer la prise en charge de la population tant dans les soins urgents que pour les soins programmés. A titre d’exemple, plus de 100 prises en charge quotidiennes aux urgences adulte, plus de 1.430 opérations chirurgicales dont 18 greffes de rein ont été réalisées depuis le début de la crise sanitaire. »
Dans ce contexte, l’ARS a nommé le 15 mars une nouvelle directrice générale à la tête de l’ARS, et pas n’importe laquelle : Valérie Denux est issue de la médecine militaire. Elle a commenté les affirmations du collectif de défense du CHU dans France Antilles, hier : « Ce sont des allégations. Tout ceci n’est ni documenté, ni étayé, ni analysé. Très clairement, les 43, ce sont des chiffres qui ont été sortis des registres de la morgue. Cela ne veut rien dire. »
A propos du reportage d’Europe 1 : « J’ai rencontré ce journaliste et à aucun moment il ne m’a parlé de ce chiffre de 43. Je lui ai expliqué que nous étions en train de travailler pour identifier s’il y avait une surmortalité, parce que des chiffres peuvent nous faire penser cela », explique Valérie Denux. « Nous avons 56 morts par semaine actuellement sur l’ensemble de la Guadeloupe, contre 53 l’année dernière sur la même période. Lissé sur l’année, on verra. Nous avons aussi eu seize signalements d’événements graves contre neuf l’an dernier à la même période. » Elle précise que 185 employés sont en arrêt de travail. « Une grosse majorité de gens, de professionnels de santé travaillent, certes dans des conditions difficiles, c’est vrai, avec des odeurs de fumée et des irritants, on ne le nie pas. Mais il n’y a pas de danger grave et imminent à aller dans ce CHU. »
La directrice de l’ARS explique que chaque dossier sur lequel un doute subsiste est envoyé à des experts en métropole pour étude. Elle doit présenter aujourd’hui son plan d’action pour le CHU. L’enquête judiciaire sur l’origine de l’incendie, elle, se poursuit. Le parquet de Pointe-à-Pitre penche vers la thèse d’un mégot de cigarette, jeté par mégarde, voire par fait exprès.
JSB 1272
> Valérie Denux, toute nouvelle directrice générale de l’ARS (à droite), visite de CHU de la Guadeloupe.