Unique dermatologue de Saint-Barthélemy, le docteur Jean-Michel Augé prend sa retraite après dix années d’exercice sur l’île. Pour l’heure, aucun spécialiste ne s’est manifesté pour endosser sa succession à plein temps.
Un dermato lui manque et toute une patientelle est dépeuplée. Après dix années de bons et loyaux services à Saint-Barthélemy, le docteur Jean-Michel Augé prend le chemin de la retraite. Seul et unique dermatologue de l’île, il quitte son poste sans avoir la certitude qu’une consœur ou qu’un confrère lui succèdera. Sans que cela ne le surprenne, toutefois.
« Quand je suis arrivé il y a dix ans, j’ai appris que j’avais été le seul candidat, sourit-il. Donc je ne m’attendais pas à beaucoup de réponses. » Depuis six mois, il multiplie les annonces afin de trouver un successeur. «J’ai eu quelques touches mais personnes pour un temps plein, regrette le praticien. J’aurais aimé que quelqu’un arrive juste derrière moi. Certains patients ont consultés presque de manière désespérée depuis plusieurs semaines. » Un afflux de patient qui trahit, de manière bien légitime, une réelle inquiétude.
Un cancer par jour
Lorsqu’il pose ses valises à Saint-Barth en 2011, c’est pour effectuer des consultations sur l’île mais aussi à Marie-Galante. Une alternance hebdomadaire qui lui permettait d’assurer un temps plein. Depuis, la situation a évolué. Mais une question mérite d’être posée : une petite île comme Saint-Barth a-t-elle véritablement besoin d’un dermatologue?
Le docteur Augé fronce légèrement le sourcil, esquisse un sourire et réplique : « En dermatologie, le principal avantage est que l’on détecte très facilement et très tôt les cancers, qui se guérissent aisément dans leur grande majorité. Je dirais qu’en dix ans, j’en ai identifié un par jour, en moyenne. Donc 300 par an, donc 3.000 en dix ans. La question est : qui va les identifier dans les dix années à venir? » Un intérim qui devrait échoir, selon toute vraisemblance, aux médecins généralistes. Néanmoins, l’expertise d’un spécialiste pourrait venir à manquer.
Des années de prévention
En effet, lorsqu’il énumère les différentes pathologies rencontrées pendant ses dix années d’exercice à Saint-Barth, le docteur Augé souligne quelques spécificités. «Dans une île, je m’attendais à trouver un nombre élevé de cancer de la peau, explique-t-il. Les champions du monde de la discipline étant les Australiens. Mais je n’avais jamais vu des personnes atteintes de plusieurs cancers de la peau à la fois. Ce fut une découverte. »
En dix années, il s’est efforcé de renforcer la prévention. Conférences, journées de dépistage, il a tenté de sensibiliser davantage la population. Notamment aux risques liés à une exposition déraisonnable au soleil. « Il existe beaucoup de maladies de peau, constate-t-il. Par exemple, le climat et la chaleur augmentent la production de sébum, donc plus d’acné. Certains saisonniers ou des lycéens de retour sur l’île voient réapparaître l’acné qu’ils n’avaient plus.» Le drame, forcément.
S’il abandonne son cabinet, ce n’est évidemment pas pour se prélasser au soleil. En compagnie de son épouse et au volant d’un véhicule adapté, le docteur entend sillonner les routes d’Europe et du monde. « Mais on ne va habiter nul part ailleurs, assure-t-il. Notre pied-à-terre est à Saint-Barth. On le garde! »