Pour le Conseil économique, social, culturel et environnemental, mener une enquête sur la protection sociale à Saint-Barthélemy consistait principalement à répondre à une question fondamentale : vaut-il mieux que l’île accède à la compétence en matière d’organisation de la protection sociale ou est-il préférable de laisser cette compétence à l’Etat tout en essayant d’améliorer la qualité des services envers les usagers. Un enjeu de taille, en somme.
Pour tenter de trouver la réponse, les travaux de la commission qui regroupe Pierre-Marie Majorel, président du CESCE, Jean-Claude Dufour, Pierre Kirscher et François Tressière ont consisté à recueillir les attentes des assurés et des cotisants, à étudier les leviers d’amélioration du fonctionnement actuel de la protection sociale avec la CPS de Saint-Barth et la MSA Poitou, et se pencher sur les évolutions possibles. « Ce rapport a été long à réaliser et reste ouvert sur les décisions de l’Etat, compte tenu des excédents que nous avons trouvés, explique Pierre-Marie Majorel. Les services à la protection sociale se sont nettement améliorés depuis 2017, même s’il reste des progrès à faire. La question est désormais de savoir comment utiliser les excédents avec le concours de l’Etat. »
Dans les conclusions du rapport, accessible en ligne sur le site du CESCE, il est précisé qu’en moyenne, selon les statistiques de l’URSSAF (caisse nationale hexagonale), 42% des cotisations et contributions sociales sont affectées à la branche maladie. Ce qui représente des recettes de l’ordre de 36 millions d’euros, en prenant en compte les exonérations de cotisations financées par l’Etat. Sans ces dernières, les recettes s’élèvent à environ 28 millions.
Où vont les cotisations ?
Par ailleurs, les dépenses de santé à Saint-Barth sont évaluées à un montant supérieur à 30 millions, en prenant en compte les dépenses hospitalières dans les établissements de Saint-Barth, de Saint-Martin et de Guadeloupe. « En l’absence des exonérations de l’Etat, le financement de la branche maladie est déficitaire », conclut le rapport. En revanche, le CESCE remarque qu’il existe des excédents nets au niveau de la retraite et des allocations familiales, à un degré moindre. « En gros, on encaisse 90 millions d’euros et on en dépense 50 », résume Pierre-Marie Majorel.
Le président du Conseil évoque des « éléments troublants » dans le rapport qui portent essentiellement sur la CSG (contribution sociale généralisée). « En fait, il y a la CSG des salariés et employeurs, qui est récupérée par l’URSSAF, et ensuite il y a la CSG patrimoniale récupérée par les impôts, explique-t-il. Or, la CSG récupérée par l’URSSAF n’est pas affectée. Cela signifie que quand on cotise pour la maladie, ça va à la maladie, etc. On voit où vont les fonds sur les feuilles de paie. Pour la CSG, on ne sait pas. » Une particularité de la comptabilité de la cotisation sociale qui ne fonctionne pas sur un système d’entrée et de sortie. Ce qui explique ce point d’interrogation sur la CSG. Particulièrement sur la CSG patrimoniale. « On n’a pas de chiffres », constate Pierre-Marie Majorel. Une cotisation qui est notamment prélevée par les notaires quand il y a des transactions immobilières.
« Compte tenu de cette situation, on constate qu’il y a des excédents, contrairement à ce que dit la direction de la sécurité sociale, poursuit le président du CESCE. Sans chercher à accéder à l’autonomie, nous sommes arrivés à une croisée des chemins. Une discussion est désormais nécessaire avec l’Etat pour savoir ce qu’il serait enclin de faire par rapport à notre situation de protection sociale et de santé. »
Dans son rapport, qui dresse un diagnostic très précis, le CESCE relève donc une « situation très favorable » qui pourrait permettre à l’Etat de « donner du champ » à Saint-Barthélemy dans les années à venir. En tenant compte du fait que la situation actuelle peut rapidement évoluer dans un sens favorable ou défavorable. Bref, le CESCE propose une base de travail et de discussion des plus complètes.