Saint-Barth - Hopital de Bruyn

L’AP-HP livre son étude de faisabilité pour un nouvel hôpital

Quelques semaines auront suffi au professeur Didier Houssin et au docteur Marc Bouche pour fignoler leur étude de faisabilité d’un nouvel hôpital à Saint-Barthélemy. Missionnés par l’AP-HP (Assistance publique – Hôpitaux de Paris) à la demande de la Collectivité territoriale, les deux praticiens sont venus en avril à la rencontre des acteurs locaux impliqués dans le secteur de la santé. Un court séjour qui aura permis de recueillir suffisamment de données pour établir un rapport de 38 pages qui a été remis à la Collectivité le 31 mai. Une étude de faisabilité qui présente les avantages et les inconvénients d’un redéveloppement de la structure hospitalière actuelle, basée à Gustavia, et de l’implantation d’un nouvel établissement à Saint-Jean.

Une vue d’ensemble
Dans un premier temps, le document permet de se pencher sur les spécificités de l’offre de soin à Saint-Barthélemy. L’hôpital de Bruyn, tout d’abord, qui regroupe un effectif de 48 personnes, compte dix lits en médecine et sept pour les soins médicaux et de réadaptation. L’étude mentionne aussi le centre d’imagerie médicale, l’Ehpad (établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes), le laboratoire de biologie médicale, le centre médico-social, la Maison de la santé, la HAD (hospitalisation à domicile) et l’offre de soin en secteur libéral (avec dix médecins généralistes, dix-sept spécialistes, neuf chirurgiens-dentistes, deux sage-femmes, treize infirmiers libéraux, vingt-six kinésithérapeutes, trois orthophonistes et deux pédicures-podologues). «Parmi les patients accueillis aux urgences, 15% sont hospitalisés à l’hôpital de Bruyn », est-il précisé. 3% sont transféré par le biais d’évacuation sanitaire vers Saint-Martin, la Guadeloupe, la Martinique ou l’Hexagone.
Parmi les difficultés mentionnées dans l’étude, l’accès à l’hôpital de Gustavia en raison de sa localisation et des embouteillages, ainsi que des moyens d’évacuations contraints et coûteux (plus de 2.500 euros pour une évacuation sanitaire vers Saint-Martin). Le « parcours complexe » des femmes enceintes en raison de l’absence de maternité est également évoqué, tout comme la vétusté des locaux actuels de l’hôpital. La liste est encore longue et elle est connue de chaque habitant de l’île.

Les objectifs du projet médical
Plus instructifs, l’étude réalisée par le professeur Houssin et le docteur Bouche détaille les principaux objectifs du futur projet médical. Comme de renforcer la filière des urgences, y compris face aux risques naturels, de véritablement structurer le dispositif d’évacuation sanitaire, de développer la télémédecine, de pérenniser et de renforcer le plateau médico-technique, de développer l’offre locale de soin dans certains domaines (périnatalité, chirurgie ambulatoire, accès aux produits sanguins) ou encore d’améliorer l’organisation administrative et technique. L’étude insiste sur l’importance du développement de la télémédecine avec la mise en place d’un pôle dédié. Elle recommande aussi d’ouvrir une salle de chirurgie ambulatoire pour « des actes courants et simples ».

L’attractivité passe par le logement
Pour le nouvel hôpital, où qu’il se trouve, les deux praticiens identifient cinq grands secteurs d’activité clinique. L’urgence, avec notamment quatre lits d’hospitalisation de courte durée ; la médecine polyvalente, avec douze lits d’hospitalisation complète et quatre chambres individuelles ; les soins médicaux et de réadaptation, avec quatre lits, un plateau de rééducation ; l’ambulatoire de médecine et de chirurgie, avec une salle spécialisée et une prise en charge programmée ; la téléconsultation, avec quatre box équipés et une zone de coordination.
Afin de parvenir à mettre en place ces évolutions, l’étude met l’accent sur la capacité à attirer des soignants. Pour ce faire, une solution : « Ouvrir un chantier logements ». Car séduire des personnels et leur donner l’envie de s’installer durablement ne pourra être possible qu’en résolvant la problématique de l’hébergement. « Il faut adosser le projet logements à celui du projet médical avec un portage à haut niveau », conseillent les rédacteurs de l’étude.

Deux statuts possibles
Au regard du statut actuel de l’hôpital, deux scenarii sont exposés. Le premier, en conservant le statut d’établissement public de santé (EPS) «étroitement articulé avec Saint-Martin sur l’organisation et le projet médical ». Les avantages ? Poursuivre et étendre les coopérations existantes dans un cadre législatif et réglementaire cadré, faciliter la mise en commun des moyens. Les inconvénients ? Saint-Barth reste « dépendant » de Saint-Martin, le statut d’EPS est peu adapté aux spécificités de l’île, les contraintes liées à l’appartenance au groupement hospitalier. Second scénario : le passage en statut d’établissement de santé privé d’intérêt collectif (Espic). Avantages ? Une plus grande souplesse dans le fonctionnement, une facilité pour accéder à des financements privés, une gouvernance plus participative. Inconvénients ? Le processus de sortie du groupement hospitalier, l’identification d’une fondation privée solide et à objet d’intérêt commun capable de porter l’Espic, la nécessité de formaliser toutes les coopérations existantes. Bref, rien d’évident.
Enfin, sur l’implantation d’un nouvel établissement à Saint-Jean, l’étude dresse là encore une liste d’avantages (accès central, proximité des pompiers et de l’aéroport ainsi que de la Maison de la santé, terrain plus vaste) et d’inconvénients (obligation de déplacer le centre de radiologie et l’Ehpad, nuisances sonores liées à la proximité de l’aéroport).
Les élus de la Collectivité vont désormais pouvoir plancher sur cette étude pour décider de l’évolution de l’hôpital. Nul doute que le nouveau directeur d’Irénée de Bruyn, Eric Djamakorzian, y jettera un œil attentif. Même s’il maîtrise d’ores et déjà toutes les problématiques de l’établissement et qu’il a lancé des appels d’offres pour les transports de jour et de nuit jusqu’à l’aéroport de Saint-Martin, de Guadeloupe et de Martinique ainsi qu’une mission d’accompagnement dans la refonte de la « stratégie d’établissement du Centre Hospitalier Irénée de Bruyn ».

 

 

Journal de Saint-Barth N°1570 du 06/06/2024

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