Passionné par la politique européenne, Valentin Dantec représente Saint-Barthélemy à la Commission européenne, dans le cadre du programme « Overseas Countries and Territories Youth Network » (OCTYN). Pendant un an, l’étudiant qui a grandi sur l’île apporte sur la scène politique européenne les problématiques propres à Saint-Barthélemy. Nous l’avons rencontré à Paris, où il nous a précisé son rôle au sein de l’institution européenne. Entretien.
Comment avez-vous découvert ce programme ?
C’est ma mère qui m’a partagé un post Facebook de la Collectivité de Saint-Barthélemy. C’était un appel à candidature pour représenter Saint-Barthélemy en tant que jeune auprès de la Commission Européenne. J’ai postulé en me disant que j’étais le seul… J’avais raison. Ils avaient ouvert deux places minimum par outre-mer européen, mais j’étais le seul pour Saint-Barth. Et le premier.
Quelles sont les étapes importantes de votre mandat ?
La partie la plus significative se déroule en octobre. Nous avons eu un voyage d’étude auprès de la Commission Européenne, où les représentants de tous les Pays et Territoires d’Outre-mer européens se sont rassemblés à Bruxelles. Pendant une semaine, nous avons pu échanger avec différents membres de la Commission. Nous avons notamment rencontré Jutta Urpilainen et son équipe, la commissaire chargée des partenariats internationaux, qui gère les fonds dédiés au Pays et Territoires d’Outre-mer. Pendant toute la semaine, il y a eu plusieurs réunions, qui se complétaient par des sessions d’échanges plus informels. C’est dans ces moments-là que j’ai pu poser des questions précises sur Saint-Barthélemy. Le reste de l’année, des réunions à distance sont organisés.
Depuis 2012, Saint-Barth ne fait plus partie du territoire de l’Union Européenne, qu’est-ce que la Commission Européenne - qui est son organe exécutif - peut lui apporter ?
Avec son statut de Pays et Territoire d’Outre-mer (PTOM), Saint-Barth n’a pas de devoirs envers l’Union Européenne, mais a des droits. Nous avons notamment accès à des fonds, il suffit de demander à la direction générale des partenariats internationaux. En 2014, Saint-Barth n’avait pas fait la demande, mais en 2021 si. On a reçu deux millions d’euros pour prévention des désastres et risques naturels. Ça concerne la rénovation des abris, l’investissement dans des services téléphoniques et internet pour qu’ils soient plus résilients et qu’on puisse les réparer très vite. En échange de cet investissement financier, la Commission veut seulement une garantie que le projet a été mené à bien.
Peut-on dire que vous tenez un rôle d’intermédiaire entre Saint-Barthélemy et la Commission Européenne ?
Grâce à ce mandat, je peux mettre sur la table l’intérêt des jeunes, propre à Saint-Barthélemy. J’ai aussi le temps de passer une semaine entière aux côtés des équipes de la Commission, alors que les gens de la Collectivité n’ont pas forcément un emploi du temps compatible. Et en échange, je peux parler à Saint-Barth des projets qui peuvent lui être bénéfique. Par exemple, Best Life 2030. C’est un autre projet de l’Union Européenne, qui permet de financer des associations qui ont pour but de préserver les écosystèmes. S’il y a des associations à Saint-Barth avec un projet de préservation de la biodiversité, elles pourraient toucher ces fonds. L’appel à projet se clôture le 8 janvier.
Pendant une semaine, vous avez travaillé aux côtés de jeunes de Saba, de Polynésie mais aussi du Groenland et d’Aruba, comment s’est déroulé cet échange ?
C’est la première fois de ma vie que je rencontre des gens de Saba et Saint-Eustache, alors que je les vois depuis ma fenêtre (rires). En discutant tous ensemble, on s’est rendu compte que nos territoires font face à des problématiques très similaires, même avec ceux qui habitent dans le Pacifique, ou au Groenland. Par exemple, l’éducation supérieure de mauvaise qualité ou absente, le coût de la vie, l’accès difficile à la santé, les problèmes écologiques, la fuite des cerveaux ou encore la difficile connexion entre les îles voisines. On partage tout, pourtant on ne se connaît pas.
Vous êtes étudiant en sciences politiques et sociales européennes, qu’est-ce que ce mandat vous apporte pour vos perspectives d’avenir ?
C’est une opportunité incroyable pour moi. J’ai pu rencontrer une commissaire, alors que j’aimerais peut-être travailler plus tard au sein de la Commission Européenne. J’ai eu l’occasion de poser plein de questions pour savoir comment intégrer cette institution, et aussi de tisser un réseau. Avec les jeunes du programme, on est justement en train de monter une association pour conserver ce réseau de connaissances, et garder contact entre nous.
Overseas Countries and Territories Youth Network (OCTYN) - Réseau Jeunesse Pays et Territoires d’Outre-mer - est un programmé lancé en 2022 par la Commission Européenne. Chaque année, la Commission ouvre un appel à candidatures pour choisir des représentants des 13 Pays et Territoires d’Outre-mer. Pendant un an, ce sont vingt-cinq jeunes âgées de 20 à 28 ans qui représentent leur territoire. L’occasion d’en apprendre plus sur cette institution, et de mettre en avant les problématiques propres à chaque territoire. Pendant une semaine, généralement en octobre, les représentants se retrouvent à Bruxelles pour échanger avec les commissaires, mais aussi entre eux. Saint-Barthélemy peut être représenté par deux jeunes de l’île. L’appel à candidature de la troisième édition s’ouvrira au printemps 2024. |