Chaque année, le Président de la Collectivité profite de la fête de la Saint-Barthélemy pour prononcer un discours en forme de bilan et perspectives. Urbanisme, environnement, santé, chantiers en cours… Voici ce qu’il faut retenir de la prise de parole de Bruno Magras.
«Rendre compte à chaque citoyen de l’action qui est menée », voilà l’objectif annoncé par Bruno Magras en introduction de son traditionnel discours du 24 août. Samedi matin en présence de la préfète Sylvie Feucher, il a notamment mis sur la table deux sujets forts : l’urbanisation qui fait grincer des dents sur l’île, et son ambition d’ouvrir un débat de fond sur la question de la santé. Avec quelques piques envers ses détracteurs et opposants, qui le lui rendent bien : Xavier Lédée (Unis pour Saint-Barthélemy) a résumé le discours présidentiel sur sa page Facebook en une chanson : “Tout va très bien, madame la marquise”…
Reconstruire vite malgré les nuisances
Tout d’abord Bruno Magras est revenu sur le passage de l’ouragan Irma, qui a dévasté Saint-Barthélemy il y a deux ans. « Certains sont tentés de considérer que c’est de l’histoire ancienne, mais les effets s’en font encore ressentir. La reconstruction n’est pas terminée », assure-t-il, citant les 700 millions d’euros d’indemnités versées par les assurances pour notre île. « Ce boom d’activité ne peut pas ne pas générer de nuisances, dont beaucoup se plaignent. S’y ajoutent les travaux de la Collectivité pour améliorer la résilience du territoire. » Il assume le fait d’avoir enclenché un programme intensif d’enfouissement des réseaux eau-électricité-fibre optique, avec l’objectif de sécuriser 100% du réseau électrique du territoire d’ici trois ans.
Ces travaux seront suspendus pendant la saison touristique de fin novembre à fin avril, sur les voies principales, mais ils se poursuivront sur les axes secondaires.
La promesse d’un ralentissement du BTP
Impossible de ne pas aborder le sujet numéro un de discussion à Saint-Barthélemy : l’urbanisme. Les constructions et les nouveaux projets continuent de fleurir partout sur l’île, la population s’inquiète. « Question brûlante », admet Bruno Magras. « Tant qu’il y aura des terrains à vendre à Saint-Barth, il y aura des acquéreurs et des demandes de permis de construire. Nous sommes tous d’accord sur l’impérieuse nécessité de protéger ce qui justifie le succès de notre île. Cela passe par une maîtrise du développement. Mais nous sommes dans un Etat de droit, tant qu’ils respectent les règles en vigueur, les permis de construire seront délivrés.» Et de commenter : « Selon le dicton, il vaut mieux faire envie que pitié. Saint-Barth fait envie, faudrait-il s’en plaindre ? » Selon lui, si les jeunes de Saint-Barth y restent, et que d’autres affluent de l’extérieur, « c’est précisément parce que nous avons su créer les conditions d’un développement harmonieux ». Il rappelle que le code de l’urbanisme a été révisé récemment, et que la carte suivra. « Les règles ici sont plus restrictives que celles du règlement national de l’urbanisme. L’objectif est bien celui d’un atterrissage du secteur de la construction. Permis anciens retardés par Irma, reconstruction et nouveaux permis se cumulent et créent ce pic d’activité actuel. Mais l’analyse des permis de construire délivrés en 2017-2018 montre que les surfaces nouvelles autorisées ont été divisées presque par deux par rapport à la période 2013-2014. Nous sommes entrés dans une phase de ralentissement du BTP, grâce à ces nouvelles règles, mais les effets commenceront à se faire sentir d’ici un an. »
Ce ralentissement promis du secteur du BTP, associé au code de l’accès au travail des étrangers qui vient d’être adopté et permettra de limiter l’affluence de main d’oeuvre moins chère, doivent rendre un peu de lest côté logement locatif, à moyen terme. « Seul le rééquilibrage de l’offre et de la demande permettra de calmer les excès actuels. Nous avons missionné le CESCE pour qu’il étudie la question de l’encadrement des loyers. Toutes les propositions qui nous parviendront seront étudiées afin de voir dans quelle mesure elles pourraient être efficaces, sans générer d’effets pervers ou de bureaucratie ingérable. »
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La santé gérée par la Com ? « Le débat doit s’ouvrir »
Il évoquait déjà cette idée en juin. Difficile pour Bruno Magras d’accepter que sur un territoire où les cotisations sociales dégagent un excédent de 30 millions d’euros, le secteur médical ne se porte pas mieux. « On constate une dégradation de la prise en charge aux urgences de l’hôpital De Bruyn ; le contexte de crise nationale aggrave la situation. La Collectivité n’a pas la compétence santé et intervient là ou elle le peut », rappelle-t-il. Elle met la main à la poche pour financer le mammographe, par exemple, et comble chaque année le déficit du budget de l’Ehpad, « 320.000 euros en 2018. L’effort consenti par la Collectivité est déjà considérable. Notre CPS, gérée par la MSA Poitou, est massivement excédentaire. Cet excédent, où va-t-il ? Se fondre dans le grand déficit », explique-t-il, rassurant la préfète Sylvie Feucher assise à sa droite : «Mes propos ne doivent pas être interprétés comme une volonté de Saint-Barthélemy de renoncer à participer à la solidarité nationale. Mais charité bien ordonnée commence par soi... » Cette nouvelle exception pour Saint-Barthélemy passerait soit par une modification du Code national de la sécurité sociale, soit par l’acquisition d’une nouvelle compétence par la Collectivité, « franchissement d’une nouvelle étape de notre évolution statutaire. Le débat doit s’ouvrir. »
JSB 1339