Saint-Barth - Romaric Magras

Romaric Magras, tête de file du groupe Saint-Barth d’Abord.

Romaric Magras : « J’incarne la relève pour ces élections »

Porté par le soutien du président sortant, Romaric Magras prend la tête de la liste Saint-Barth d’Abord pour mener la campagne des élections territoriales des 20 et 27 mars prochains. Elu depuis cinq ans, le candidat entend « rassurer » la population en lui montrant que son équipe est capable de prendre le relai de Bruno Magras et mener une politique empreinte d’une « gestion saine et responsable ».    

 

Qu’est-ce qui a motivé votre candidature ?

Depuis cinq ans, je suis un élu local. Avant cela, j’avais la motivation d’entrer sur une liste mais il n’y avait plus de place. Depuis les débuts de la Collectivité, je me suis toujours intéressé au fonctionnement de ce nouveau statut et de cette nouvelle île que j’ai vu grandir en termes de développement et d’autonomie. Parallèlement à cela, en 2017, j’ai eu l’opportunité de monter sur la liste Saint-Barth d’Abord et pendant ces cinq dernières années j’ai occupé plusieurs postes dans différentes commissions : culture, urbanisme, marchés publics, et président de la commission de sécurité. Ça m’a permis d’approfondir mes connaissances, de me rendre compte de comment fonctionne la Collectivité de l’intérieur. C’est organisé, une équipe qui aide et accompagne les élus. Une belle expérience. Après s’est posée la question du remplacement de Bruno (Magras) quand il nous a annoncé qu’il ne souhaitait pas continuer. Et c’est ma candidature qui a été portée par le groupe pour représenter les couleurs de Saint-Barth d’Abord lors des prochaines élections. Il y a eu une discussion entre membres élus, sachant que l’idée me trotte dans la tête depuis les sénatoriales. Je me suis posé la question de mon poids en tant qu’élu au Sénat ou à la Collectivité territoriale, et le choix a été vite fait. Parce qu’un élu local qui prend une mesure, c’est visible. Au Sénat, c’est un peu plus éloigné.

 

Vous bénéficiez de l’appui de Bruno Magras. Que répondez-vous à ceux qui prétendent que le président sortant continuera à diriger l’île si vous êtes élu ?

Je leur réponds par un proverbe : les conseilleurs ne sont pas les payeurs. Quand on prend la décision de conduire une liste, avec toutes les responsabilités que ça représente, il faut et on peut recevoir des conseils. D’ailleurs, Bruno s’y est engagé. A l’échelle de la Collectivité ou à l’échelle nationale, comme Macron qui pendant la crise du Covid a sollicité d’anciens présidents, le conseil est toujours bon à prendre. Après, pour la décision, c’est autre chose. J’entends travailler en toute transparence et en toute autonomie. Ceux qui disent qu’il y aura des ficelles, je les coupe tout de suite. Et j’ai conscience que rien n’est gagné d’avance. Ce n’est pas parce que l’on a le soutien de Bruno Magras que c’est gagné. Tout reste à faire et il faut aujourd’hui pouvoir rassurer la population. Parce que c’est un grand homme qui part et prendre le relai derrière lui, c’est tout un défi. Donc il faut rassurer les gens et leur montrer que la relève, que j’incarne pour ces élections, est tout à fait capable de mener à bien cette mission.

 

Précisément, Bruno Magras lègue un lourd héritage à son successeur. Comment prendre sa suite et gérer cet héritage ?

J’entends la poursuivre d’une manière à la fois simple et compliquée. C’est-à-dire assurer une gestion saine de cette Collectivité. On a une autonomie financière mais elle est fragile, il ne faut pas faire n’importe quoi en termes de fonctionnement et d’investissements. Il faut avoir un avis équilibré et prendre les décisions les plus justes dans l’intérêt général pour le fonctionnement de l’île. Donc oui, c’est un lourd héritage et il faut pouvoir le préserver dans le temps. Il en dépendra de la qualité de vie sur le territoire, de la fiscalité aussi pour les habitants. C’est la raison pour laquelle on entend poursuivre cette gestion de manière responsable.

 

La manière de conduire les affaires de la Collectivité va être déterminante pour l’île dans les prochaines années. Notamment en matière de développement. Quelle va être votre politique sur cette question ?

Il s’agira de maîtriser le développement. De manière durable. Nous sommes arrivés sur une crête et il faut y rester pour avancer d’une façon stable. Ça passe par plusieurs axes politiques comme l’aménagement du territoire ou l’amélioration de la qualité de vie. Je vois notamment des problématiques comme celle de la gestion des ordures, des eaux pluviales, l’urbanisme. Nous avons défini des axes principaux et des priorités. La première est la santé. Il faut améliorer l’accès et l’offre de soin, qui se sont dégradées ces derniers temps. Pour pouvoir proposer l’évolution statutaire de l’hôpital, comme cela a été évoqué par le président. C’est une mesure tout à fait réfléchie et qui permettrait à l’hôpital de gagner en qualité de fonctionnement. On n’oublie pas les personnes âgées ou handicapées qui doivent bénéficier d’un lieu pour suivre des soins, des accompagnements. L’idée est pouvoir faire ça ici, à Saint-Barth. L’éducation et le développement des projets de formation sont aussi des priorités, comme la sécurité. On a vu que des choses se sont dégradées ces derniers temps mais au-delà de ça, on a aujourd’hui sur le territoire un laisser-aller. Il faut réorganiser notre service de police, lui donner une nouvelle identité, et améliorer encore notre collaboration avec la gendarmerie.  

 

Plus généralement, quels thèmes entendez-vous développer pendant votre campagne ?

Les trois priorités déjà évoquées mises à part, il y a les problèmes de circulation, bien sûr. Cela passe par une politique de sécurisation qui a déjà commencé avec la possibilité de continuer à installer des trottoirs, de fluidifier la circulation. Par exemple à Saint-Jean en face de l’aéroport en fin d’après-midi, il faut trouver des solutions. Il y a la problématique des eaux pluviales et d’une manière générale, celle du parc automobile. Tout le monde a conscience aujourd’hui que le parc automobile est important et, sans pour autant aller à la sanction, l’idée est d’engager une discussion avec les professionnels qui eux aussi ont conscience de la difficulté, et de pouvoir savoir où poser une limite pour avoir un parc de location cohérent. Et puis il y a bien entendu l’urbanisme. Le Code a été revu et est beaucoup plus sévère depuis décembre 2020. Mais on ne verra les effets de cette politique qu’en 2024. La validité des permis ayant été allongée de quatre ans, les projets qui sortiront de terre progressivement ne seront véritablement visibles qu’en 2024. Il faut noter que le nombre de permis de construire a été revu à la baisse (selon les chiffres avancés dans le rapport territorial lors du débat d’orientation budgétaire, 170 permis ont été accordés en 2019, 121 en 2020 et 134 en 2021, ndlr) et la surface plancher autorisée qui a été revue à la baisse (de 33.347 mètres carrés en 2019 à 15.478 en 2021, ndlr). C’est la preuve que cette révision du Code a permis de diminuer les constructions sur l’île. On souhaite aussi pouvoir encourager la reconstruction et nous consacrer davantage à la partie logement en développant une charte architecturale dans chaque quartier. On veut mener ce travail avec les habitants de l’île de manière à pouvoir donner un cachet à chaque secteur de l’île. On va donc aussi travailler sur la proximité. Il y a aussi la transition énergétique qui va passer pas trois éléments forts. Le premier sera l’écriture de la PPE (programmation pluriannuelle de l’énergie, ndlr) qui permettra de savoir où l’on va et ce que l’on utilise. Il faudra se tourner vers des énergies plus vertes. Avec l’installation de panneaux solaires, par exemple. Il faudra également élargir le patrimoine foncier de la Collectivité pour pouvoir développer les secteurs verts de l’île et répondre à la question du logement, notamment pour poursuivre le partenariat de logement avec l’État pour les personnels de santé et de l’éducation.

 

Dans votre allocution de candidature, vous évoquez la revalorisation de la culture locale.

C’est aussi un des axes sur lesquels on souhaite travailler. En parlant avec les habitants de l’île, on se rend compte qu’ils ont perdu cette âme de Saint-Barth. Il s’agit de savoir d’où on vient. C’est aussi le sens, l’origine de Saint-Barth d’Abord. C’est pouvoir remettre en valeur ce patrimoine local et que les jeunes générations ou les touristes de passage le découvrent ou le redécouvrent.

 

Votre liste est-elle d’ores et déjà arrêtée ? Comment va-t-elle être composée ?

On trouve des personnes qui étaient dans l’équipe en 2017 mais également de nouvelles personnes qui se sont manifestées. Elles ont grandi et ont toujours vécu avec la politique de Bruno Magras et, du coup, sont venues vers nous pour apporter leur contribution. On a depuis des mois des groupes de travail pour élaborer ensemble notre projet pour Saint-Barth. Parce que ce n’est pas Romaric seul qui porte et qui a fait le programme. Il a été construit, débattu. On a créé une unité, une cohérence et une force. Pour le porter vers la population pour la convaincre de notre compétence.

 

Quelle est votre position sur l’évolution statutaire de l’île ?

Pour la santé, il faut être pragmatique. Le projet d’évolution passe par trois étapes. Pouvoir récupérer le foncier de l’hôpital, qui appartient toujours au département de la Guadeloupe. Avec l’ARS (Agence régionale de santé), revoir le système d’évacuation sanitaire car aujourd’hui il y a un réel problème avec un avion de nuit basé à Saint-Martin. Enfin, pour l’évolution statutaire de l’hôpital, améliorer son fonctionnement car c’est là que se situe le problème. A travers ce changement, nous aurions une autonomie de décision. Un gros projet, un travail de longue haleine, à mener avec l’ARS et l’État, qui détient la compétence santé. Il faut une offre de soin qui réponde aux besoins de Saint-Barth. Par ailleurs, pour l’amélioration des offres de soins, une maison de la santé nous permettrait de recevoir un ou des spécialistes pour des consultations, ce qui éviterait à la population d’avoir à se déplacer à Saint-Martin. Une autre piste est la télémédecine, mais qui demande un certain nombre de moyens pour être mise en place. Là encore, cela demandera des adaptations.

 

Y-a-t-il une décision qui vous semble essentiel de prendre d’emblée pour la prochaine mandature ?

On a un programme qui est riche, qui est dense. Ma priorité sera de travailler sur la problématique de la santé. Franchement, c’est notre premier point d’importance sur la liste. Il va falloir entamer le dialogue avec l’ARS. Avec les élections nationales, nous serons peut-être dans une période de flou. Pour l’éducation, il faudra lancer le projet de délocalisation des écoles, car ce sera long.

 

Vous imaginez-vous assis dans le fauteuil de président de la Collectivité ?

Je dis qu’on ne nait pas président, on le devient. Ça viendra comme ça viendra. Je suis un homme qui avance pas à pas. On va y aller étape par étape. La première est de convaincre la population. Ensuite, nous verrons. C’est une responsabilité qui est importante, que je mesure, et c’est une fonction qui ne me fait pas peur. Quand je prends une responsabilité, je l’assume. 

Journal de Saint-Barth N°1460 du 17/02/2022

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