Saint-Barth -

©Ministere de l'Outre-mer

Jean-François Carenco, un ministre délégué aux Outre-mer sous la tutelle de l’Intérieur

Préfet depuis plus de vingt ans, Jean-François Carenco franchit le rubicon et se lance en politique. Lundi 4 juillet, il a été nommé ministre délégué aux Outre-mer. Il est placé sous l’autorité du ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, qui devient « ministre de l’Intérieur et des Outre-mer ».
Agé de 69 ans, Jean-François Carenco prend la place abandonnée après seulement quelques semaines par Yaël Braun-Pivet, depuis élue présidente de l’Assemblée nationale. Natif de Talence en Gironde, diplômé de l’Ena (Ecole nationale d’administration) en 1979, il a notamment été préfet à Saint-Pierre-et-Miquelon (1996-1997) et en Guadeloupe (1999-2002). Il a également été secrétaire général du haut-commissariat en Nouvelle-Calédonie en 1990 et 1991. Depuis 2017, il était le président de la Commission de régulation de l’énergie. Lorsqu’il n’était pas préfet, Jean-François Carenco a endossé à plusieurs reprises la fonction de directeur de cabinet pour l’ancien ministre Jean-Louis Borloo.
Pour Jean-François Carenco, il s’agit de la première immersion directe dans la sphère politique. Une entrée en matière qui va requérir toute son expérience diplomatique de représentant de l’Etat puisqu’il hérite d’une fonction aux échéances cruciales. Comme l’évolution statutaire de la Nouvelle-Calédonie, pour exemple. Il va également devoir composer avec le message de rejet adressé au président de la République par les populations ultramarines lors des récentes élections. Ainsi, lors du second tour de la présidentielle, Emmanuel Macron a été devancé par Marine Le Pen à la Réunion, en Guadeloupe, en Martinique, en Guyane, à Saint-Martin et à Saint-Barthélemy. Aux législatives, c’est l’alliance des gauches qui s’est adjugé la majorité des circonscriptions. Par conséquent, le poste de ministre délégué en charge des Outre-mer va nécessiter de solides qualité de négociateur. Une mission qui semble taillée pour Jean-François Carenco puisqu’il jouit d’une réputation de spécialiste des « situations compliquées ».

Ministre délégué, un recul pour les Outre-mer ?
Les Outre-mer ne disposent donc plus d’un ministère à part entière. En prenant la décision de nommer un ministre délégué en charge des Outre-mer - sous la tutelle du ministre de l’Intérieur - au sein de son gouvernement, la première ministre Elisabeth Borne envoie un message pour le moins négatif aux territoires ultramarins, à leurs élus et à leurs populations. De fait, les réactions venues d’outre-mer ne se sont pas faites attendre. La fédération PS (Parti socialiste) de Guadeloupe parle d’une « choquante punition après sanction électorale ». Selon son premier secrétaire, il s’agit « d’une régression » et « d’une relégation inadmissible », même s’il salue « la nomination à la rue Oudinot d’un haut-fonctionnaire très bon connaisseur de nos territoires ».
A nos confrères de la 1ère, le député polynésien Moetai Brotherson exprime son indignation : « C’est un signal très particulier qui est envoyé aux Outre-mer. On se souvient de la manière dont monsieur Darmanin avait envoyé la troupe en Guadeloupe. On se souvient également de ses déclarations sur la Nouvelle-Calédonie : ce n’est pas forcément un message très enthousiasmant qui est envoyé aux Outre-mer en ce jour. » Le député guadeloupéen Olivier Serva (Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires) regrette que les Outre-mer soient sous « la dépendance du ministère de l’Intérieur, et non du Premier ministre » et s’interroge sur la 1ère : « Serait-ce un message sécuritaire pour les Outre-mer alors qu’ils auraient besoin d’autre chose ? Par exemple, un signal de discussion, d’échange, de prise en compte des spécificités (...) de la prise en compte (...) de la nécessité de réintégrer les soignants suspendus non vaccinés, de la question du pouvoir d’achat. »
Du côté du député de Saint-Barthélemy et Saint-Martin, Frantz Gumbs, aucune réaction. La sénatrice Micheline Jacques, en revanche, estime que Jean-François Carenco est «assurément attentif à nos territoires dont il a une connaissance certaine».

 

Journal de Saint-Barth N°1480 du 07/07/2022

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