Le président de la Collectivité territoriale, Xavier Lédée, a pris la décision de retirer les délégations de police et de sécurité à Marie-Hélène Bernier, la première vice-présidente. Xavier Lédée justifie sa position en évoquant une enquête administrative dont Marie-Hélène Bernier ferait actuellement l’objet. Cette dernière dénonce une « décision unilatérale et politique ».
Le temps des mésententes cordiales et des discordes étouffées dans l’atmosphère feutrée des bureaux présidentiels de la Collectivité territoriale semble bel et bien terminé. Entre le président, Xavier Lédée, et la première vice-présidente, Marie-Hélène Bernier, le divorce apparaît d’ores et déjà consommé. Si l’entente entre les deux élus s’est rapidement dégradée depuis leur prise de pouvoir en mars 2022, la possibilité d’une rupture n’avait jamais été évoquée au grand jour. Mais depuis le 29 décembre et la signature d’un arrêté par le président Lédée qui officialise le retrait des délégations « police » et « sécurité » jusqu’alors confiée à Marie-Hélène Bernier, le pacte de non-agression a définitivement été rompu.
Dans le document officiel daté du 29 décembre et signé de la main du président Lédée, ce dernier justifie sa décision par « la rupture constatée du lien de confiance à l’origine des délégations de fonctions en ce qui concerne les domaines de la police et de la sécurité ». Un argument des plus flous et qui ne repose, dans cet écrit, sur aucune précision quant à la raison de la « rupture constatée du lien de confiance ». D’autant que, dans le même temps, le président reconduit les délégations « éducation » et « santé » confiées à sa première vice-présidente.
Une mesure « préventive »
Contacté par le JSB, Xavier Lédée explique : « Il existe un conflit entre Hélène et un agent. Par conséquent, de manière préventive et conservatoire, j’ai retiré les délégations police et sécurité parce que si j’écoute ce que dit Hélène et l’autre personne concernée, il y a de grandes chances pour que ça parte en justice. Donc il ne me semblait pas très concevable de garder des délégations sur la police et la sécurité alors qu’il y a un risque réel de poursuite judiciaire derrière. » Pour l’heure, néanmoins, il semble que seule une enquête administrative ait été ouverte (elle serait conduite par des services de Guadeloupe), sur le fondement d’une plainte déposée par un agent. En l’occurrence, l’actuel collaborateur de cabinet de la première vice-présidente. « Il n’y a pas de volonté de sanction, affirme Xavier Lédée. Une enquête est en cours, la présomption d’innocence existe et, à la fin, les choses seront clarifiées. Il s’agit juste d’une mesure pour que l’enquête se passe en toute sérénité. » Une décision qui, si elle a vocation à installer une quiétude dans la conduite de l’enquête administrative, a été accueillie avec perplexité et incompréhension par des élus. A commencer par la principale intéressée, Marie-Hélène Bernier.
Une « décision unilatérale et politique »
La première vice-présidente assure « ignorer les raisons objectives » qui ont poussé Xavier Lédée à lui retirer ses délégations de signatures pour la police et la sécurité. « J’en ai été informée par courriel et il (le président Lédée) ne m’a pas donné plus de détails, poursuite-elle. On ne m’a communiqué aucun élément sur l’enquête administrative ni sur les griefs qui me sont reprochés. » Pour l’élue, il s’agit d’une « décision unilatérale et politique qui vise à m’empêcher d’agir au service de notre communauté ». Un avis partagé par les conseillers territoriaux issus de la liste conduite par Marie-Hélène Bernier lors de la campagne 2022.
A travers un communiqué, les six anciens colistiers de Marie-Hélène Bernier (Bettina Cointre, 2e vice-présidente, Maxime Desouches, 4e vice-président, Pascale Minarro-Baudoin, Dimitri Lédée, David Blanchard et Jonas Brin) « condamnent solidairement » l’arrêté pris par Xavier Lédée. « Nous nous étonnons que la perte de confiance invoquée pour justifier cette décision ne conduise qu’à un retrait partiel de délégations de fonctions, écrivent-ils. La confiance ne peut être unilatérale. C’est en effet en confiance que nous avons fusionné nos listes et considérons que c’est grâce à notre programme commun que nous avons remporté les élections. »
De fait, pour mémoire, c’est la liste « Saint-Barth action-équilibre » de Marie-Hélène Bernier qui était arrivée en deuxième position au premier tour des élections territoriales de mars 2022 avec 27,07% des voix. Loin derrière les 46,15% de Saint-Barth d’Abord mais devant les 26,78% de la liste conduite par Xavier Lédée, « Unis pour Saint-Barthélemy ». Et ce n’est qu’après la fusion des deux listes et d’intenses tractations que Xavier Lédée a pu s’asseoir dans le fauteuil de président.
« Nous souhaitons dire à la population que nous nous sommes engagés par conviction et au service de l’île et que nous restons pleinement mobilisés », écrivent les six élus et anciens colistiers de la première vice-présidente. Et de conclure : « Il va sans dire que nous tirerons les conséquences de la situation qui résulte de l’arrêté pris à l’encontre d’Hélène Bernier. » Une dernière remarque qui laisse augurer de quelques positionnements peu enclins à favoriser la conduite sereine des affaires au sein de la Collectivité.
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