Cette semaine, dimanche n’est pas un jour de marché. Il n’est pas, non plus, un jour férié que les agents de la Collectivité pourront savourer en milieu de semaine. Ce dimanche, c’est le 9 octobre. Une date hautement symbolique qui se distingue de beaucoup d’autres dans le calendrier annuel et surtout dans l’Histoire de Saint-Barthélemy. En effet, c’est le 9 octobre 1847 que le Royaume de Suède, alors possesseur de l’île, a officiellement affranchi ses derniers esclaves. Toutefois, comme à l’habitude, aucune cérémonie destinée à commémorer la décision de mettre fin à l’asservissement des centaines de femmes et d’hommes n’a été programmée. Selon plusieurs sources sur la structure démographique de Saint-Barth en 1846, la Suède recense à l’époque 2.630 habitants sur l’île dont 1.308 blancs, 788 « libres de couleurs » et 534 esclaves.
Les recherches de Richard Lédée
A Saint-Barthélemy, c’est Richard Lédée qui a fait ressurgir la date du 9 octobre 1847. Par le biais de ses recherches, essentiellement, comme il l’a expliqué lors d’une soirée commémorative organisée en octobre 2019 au théâtre du Paradis, à Gustavia. « Au départ tout jeune je disais comme tout le monde, qu’il n’y avait jamais eu d’esclavage à Saint-Barth, précisait-t-il lors d’un échange avec des enfants de la Minischool. Lors de mes études d’architecture navale à Nantes, j’ai rédigé un mémoire sur les bateaux de travail devenus bateaux de course aux Antilles, j’ai écrit dans le chapitre consacré aux Saintoises à Saint-Barth qu’il n’y avait jamais eu d’esclavage à Saint-Barthélemy. Puis je me suis dit “attends, tu ne peux pas écrire ça, quelque chose ne va pas”. En fait, il y avait déjà eu des écrits. » Et de poursuivre : « Au début, ils (les esclaves) sont arrivés avec les Français. Ils faisaient probablement de l’agriculture, en particulier la culture de l’indigo. Puis avec les Suédois ; c’est eux qui ont construit tout Gustavia, les routes, les forts, les maisons, les citernes ; tout cela a été bâti par les esclaves. »
Richard Lédée expliquait alors avoir trouvé la trace d’un bateau négrier baptisé le « Stockholm », parti de Saint-Barth pour l’Afrique et revenu en 1799. En 1825, plusieurs esclaves ont été confisqués à une famille de Gustavia par le gouvernement de Saint-Kitts. Parmi ces esclaves figurait Angélique, décrite comme ayant été achetée en 1799 du brig « Stockholm ». Ce bateau avait participer à la traite à Cape Coast, une ville côtière de l’actuel Ghana. Angélique est décrite comme provenant de la tribu Minnah.
Selon Richard Lédée, au plus fort de l’activité de l’île entre 1805 et 1818, il y avait 6.000 habitants à Saint-Barth dont 4.000 à Gustavia. « Parmi eux, 1.000 blancs, 2.000 esclaves et 1.000 libres de couleurs ainsi que des esclaves affranchis (ou leurs descendants) qui sont parfois aussi de riches propriétaires d’esclaves », assurait-t-il.
Deux fonds d’archives permettent d’explorer le passé de l’île à cette période : le fonds suédois de Saint-Barthélemy situé aux archives de l’outre-mer à Aix-en-Provence et la collection Saint-Barthélemy à Stockholm. De nombreux documents sont également consultables en Guadeloupe.