Saint-Barth - tribunal administratif

Tribunal administratif : « Il n’est de pire aveugle que celui qui ne veut pas voir »

Confiné dans la petite salle de conférence de la Chambre économique multiprofessionnelle de Gustavia, le tribunal administratif a réussi à examiner seize dossiers dans des créneaux horaires de bureau. Une performance qui a toutefois été marquée par l’évocation de litiges récurrents. Comme celui qui oppose la société Maison Camp David à la SNC La Case Saint-Barth. Un contentieux qui porte essentiellement sur une demande d’annulation du permis de construire accordé en juin 2021 à la société La Case pour bâtir une résidence de tourisme de cinq logements.

Le dossier comprend trois volets distincts mais qui, finalement, ont un objet similaire : celui de contester vertement l’implantation de la résidence à quelques encablures de la Maison Camp David. L’un des arguments développés par le requérant est un affichage inadéquat du permis de construire. « Il n’est de pire aveugle que celui qui ne veut pas voir », commente le rapporteur public, qui estime que « contrairement à ce qui est soutenu il ressort des photos versées au dossier et du procès-verbal de constat établi par huissier que le panneau était parfaitement visible depuis la voie publique ». L’autre argument du requérant se fonde sur une supposée fraude puisqu’il considère que deux permis ont été déposés pour, selon lui, un « ensemble immobilier unique ». En effet, il estime que la résidence hôtelière de La Case ainsi que le restaurant le GypSea sont une seule et même structure. Le rapporteur public s’emploie alors à définir la notion de fraude mais aussi celle d’ensemble immobilier unique. Ce, dans le but de clarifier la situation du point du vue du droit. Un exposé quelque peu technique mais que le rapporteur public conclut avec simplicité en précisant : « Il ressort à l’inverse des pièces du dossier qu’il n’y a aucune « imbrication » physique entre les deux constructions : le restaurant et les cinq bungalows constituent des constructions bien distinctes, certes implantées à côté, ne partageant aucun équipement commun. Le restaurant GypSea a été ouvert le 15 décembre 2020, après obtention d’un permis de construire le 6 décembre 2019. La société La Case n’a quant à elle obtenu des droits sur la parcelle adjacente au restaurant pour le projet de résidence hôtelière que le 19 janvier 2021, en signant un bail emphytéotique avec les propriétaires de cette parcelle : l’on voit mal comment aurait pu être anticipé, au vu de cette chronologie, une ensemble immobilier unique artificiellement fragmenté, dont la résidence constituerait une «extension » du restaurant GypSea. » Et il se prononce pour le rejet de la requête. Un avis que l’avocat de Maison Camp David ne partage évidemment pas.
Lors de son intervention, l’avocat insiste sur l’absence de visibilité du panneau annonçant le permis de construire. De plus, il rappelle qu’en droit administratif, « le saucissonnage est proscrit » en évoquant la question des deux permis de construire distincts. « Si la notion de fraude est un très gros mot, elle existe en droit de l’urbanisme et de temps en temps, elle doit être retenue », insiste-t-il.
Le tribunal administratif rendra son délibéré en début de semaine prochaine.

 

Journal de Saint-Barth N°1542 du 23/11/2023

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