« Je vais te tuer, je vais te couper le cou ! » Voilà la déclaration qu’avait faite en 2019 cet homme à la mère de son enfant. Ce n’était pas la première fois. La victime présente à l’audience, jeudi dernier, est apparue très éprouvée.
Ils sont séparés depuis plusieurs années mais leurs rapports sont ultra tendus, et d’ailleurs, l’homme fait l’objet d’une interdiction d’entrer en contact avec son ex. Mais ils ont un enfant ensemble, impossible de couper les ponts totalement.
Ce jour-là, l’homme ramène ce dernier à sa mère. Il est énervé par la tenue vestimentaire de la fillette, qui ne porte pas de culotte. Selon lui, cela met l’enfant en danger vis-à-vis du nouveau compagnon de la mère. Sur le parking, le ton monte et il hurle à celle-ci: « Je vais te tuer, je vais te couper le cou ! » Ce n’est pas la première fois qu’il profère ce type de menace, il a d’ailleurs déjà été condamné pour cela le 12 novembre dernier, à Saint-Martin. Elle a peur. Présente à l’audience elle est raide comme une pierre et tente de retenir ses larmes. Pour lui, la gravité des faits est exagérée. Il s’excuse, tout en assurant que c’est « juste une façon de parler, les mots ont dépassé ma pensée. Elle m’a déjà dit elle-même ces choses là à la maison, elle était toujours la première à m’agresser. » Si il s’est présenté avec une voix à peine audible, quand il s’agit d’aborder les faits et sa relation avec Madame, l’homme hausse le ton et s’agite. « On sent tout de suite que vous êtes impulsif, on sent que ça monte », constate la Présidente. « Vous ne pensez pas que ça peut effrayer une femme ? » « Je ne suis pas agressif. » « Mais les mots sont aussi très violents. » « Si elle avait peur de ces mots-là, elle ne m’insulterait pas elle-même. » « Si elle vous insulte et vous menace, pourquoi n’avez-vous pas déposé plainte ? » « Je suis un homme, j’essaie de me défendre par moi-même. »
Le conseil de la victime, MeMontravers, déclame un plaidoyer pour toutes les femmes victimes de violences. « Je voudrais que ma voix puisse servir celle de ces femmes, ces amies, ces sœurs qui ont été ou sont toujours terrorisées par leur conjoint.»
Il se tourne vers le prévenu, et d’une voix forte, répète : « Je vais te tuer, je vais te couper le cou ! Non, Monsieur, ce n’est pas juste une façon de parler. Je vais peut-être parler comme ça à toutes les femmes que je croise ? Je vais peut-être parler comme ça à Madame la Présidente ? » Il dresse un portrait rapide de l’histoire de ce couple, houleuse alors qu’ils étaient ensemble, encore plus depuis la séparation. « Ce Monsieur est inquiétant. Voyez ce qu’il lui avait écrit à l’époque de la séparation : “Avec ce que je pense aujourd’hui, je risque la perpétuité.” » Il laisse un blanc. « Si je vivais sur cette île en permanence, avec un homme qui veut me tuer, je serais terrorisé. Avoir un enfant ensemble ne donne aucun droit sur la mère. Il n’est pas trop tôt pour dire à ce Monsieur que ce n’est pas une façon de parler. Ça suffit.» Il demande le maintien de la mesure d’éloignement, l’obligation de soins psychologiques, 15.000 euros pour le préjudice moral et 12.000 euros pour les frais d’avocat engagés par sa cliente (quatre audiences au total). Le tribunal donne la parole à cette dernière, prostrée sur sa chaise. D’une voix étranglée de sanglots, elle lâche : « Si elle n’avait pas de culotte, c’est parce qu’elle était en pyjama… »
C’est au tour du procureur de prendre la parole, il réfute cette histoire de culotte. «L’enfant avait passé la journée avec son père, il lui appartenait de la vêtir. » Il pointe la récurrence des menaces depuis plusieurs années, la violence des propos, et rappelle que la loi prévoit 5 ans de prison pour ces faits. Il requiert contre le prévenu 12 mois de prison avec sursis, une obligation de soins, une prolongation de la mesure d’éloignement et un suivi socio-judiciaire.
Quinze jours plus tôt, à Saint-Martin, le même homme avait été condamné pour menaces et insultes envers son ex, mais pas pour violences. Son avocate Me Malaval le souligne. « Il n’est pas poursuivi pour violences mais pour menaces », rappelle-t-elle, fustigeant le portrait « très négatif » dressé par son confrère. « Dans un contexte de séparation à laquelle il n’était pas favorable, Madame avait refait sa vie rapidement. On peut comprendre sa colère, certes mal exprimée. Ces propos sont violents, oui, mais lui n’est pas quelqu’un de violent. Aujourd’hui, la séparation a été admise de part et d’autre. Madame est très marquée et je peux le comprendre, mais 15.000 euros de dommages et intérêts, cela me paraît un peu ahurissant et illégitime. » Le prévenu conclut l’audience en répétant : « Mes mots ont dépassé ma pensée.»
Le délibéré sera rendu le 10 décembre.