Saint-Barth - Justice illustration

Kyrielle habituelle de délits routiers

A chaque audience foraine du tribunal à Saint-Barthélemy, la majorité des dossiers concernent des délits routiers, bien souvent de la conduite sous alcool. La séance de jeudi dernier n’échappe pas à la règle.

Sa mère le couvre après une course-poursuite
C’est la deuxième fois que cet homme de 23 ans est arrêté au volant d’une voiture, alors qu’il n’a pas le permis de conduire. Le 25 septembre 2019, les gendarmes effectuent un contrôle à l’entrée de Gustavia et voient passer le garçon au volant, téléphone à l’oreille. Ils lui font signe de s’arrêter. Lui ralentit, fait mine de se ranger, et redémarre sur les chapeaux de roue. Poursuivi par les gendarmes, il traverse Gustavia à fond la caisse, double les autres automobilistes, grille un stop. Les militaires stoppent la poursuite, trop dangereuse. Mais ils ont enregistré la plaque d’immatriculation de la voiture. De retour chez lui, le garçon dit à sa mère : «J’ai fait une connerie. » Propriétaire du véhicule, celle-ci est convoquée chez les gendarmes. Elle tente de couvrir son fils. En vain : les images de vidéosurveillance de la ville de Gustavia ne trompent pas. Après un rappel à la loi au sujet des déclarations mensongères, elle admet finalement que c’est bien son enfant qui était au volant. Il avait déjà été condamné quelques mois plus tôt pour conduite sans permis et refus d’obtempérer, exactement les mêmes faits. A la barre, bien habillé, il regrette : « J’ai complètement paniqué, je n’ai pas pensé aux conséquences. J’ai perdu le contrôle de moi-même. C’était il y a un an, depuis, j’ai réfléchi.» « C’est incongru de penser pouvoir échapper aux gendarmes sur une si petite île », note la présidente. Le procureur soupire : « Tant qu’il n’y a pas de peine d’emprisonnement, personne ne comprend. » L’avocat du prévenu, Me Barreiro, défend le nouveau comportement de son client : « La garde à vue a été le point de départ de sa compréhension. Aujourd’hui, Monsieur se tient à carreaux.» Il écope de cinq mois de prison avec sursis, d’une amende et devra effectuer un stage de sensibilisation à la sécurité routière.

Il chute à scooter avec 2,68 g d’alcool dans le sang
Audience express pour ce trentenaire, qui le 22 mai dernier vers 4h30 du matin, a été trouvé gisant au sol, inconscient, près de son scooter. Les analyses ont révélé qu’il avait 2,68 grammes d’alcool dans le sang, un taux très élevé. « Vous auriez pu vous tuer, Monsieur », souligne le procureur. « Avec 2,68 grammes d’alcool dans le sang, je ne sais même pas comment vous faites pour monter sur le scooter! » Le prévenu est condamné à trois mois de prison avec sursis et à l’obligation de suivre un stage de sensibilisation à la sécurité routière.

Il chute à scooter avec 2,12 g d’alcool dans le sang
Histoire similaire à la précédente : en plein Carnaval, ce Saint-Barth de 20 ans s’est laissé aller sur l’alcool et le cannabis. En sortant d’un établissement de Saint-Jean, à scooter avec une passagère américaine, alors qu’il pleut, il glisse. Son casier judiciaire est vierge. Le cannabis, « j’ai fini avec ça», jure-t-il, et son avocate le prouve en fournissant des analyses sanguines. « Il s’est pris en main à la suite de cet accident », défend Me Malaval. Elle soulève des difficultés dans la procédure, que le tribunal prendra le temps d’étudier : le délibéré sera rendu le 3 décembre. Las, le procureur résume: « Comme d’habitude, les jeunes sortent, boivent, fument, prennent le scooter et chutent. » Il requiert trois mois de prison avec sursis.

Débats de droit
Un Portugais de 52 ans contrôlé avec 1,53 gramme d’alcool dans le sang est convoqué à la barre. Son avocate Me Desailloud soulève plusieurs exceptions de nullité, c’est à dire des arguments sur la forme de la procédure, qui peuvent conduire à son annulation. Pour elle, il y un problème d’homologation de l’éthylomètre, qu’elle décrit à renfort d’articles de loi et de décisions de justice antérieures. De plus, elle note une incohérence dans les heures mentionnées sur les documents de l’enquête. « Il a été contrôlé rue de la République à 23h30, l’analyse à l’éthylomètre a été faite à 23h35. Les gendarmes sont très forts, parce qu’en moins de cinq minutes, ils ont eu le temps d’arrêter mon client, le faire souffler, l’emmener dans leur voiture, traverser Gustavia jusqu’au fort, ouvrir le lourd portail, effectuer les tests de rigueur et le soumettre à l’éthylomètre ! C’est impossible, l’heure est fausse. » Le procureur réfute ces arguments, lui aussi citant quantité de textes règlementaires. Le tribunal se laisse un délai pour examiner l’affaire. Le délibéré sera rendu le 3 décembre.
Autre cas, même avocate, même débat sur l’homologation de l’éthylomètre. Le prévenu est un autre quinquagénaire portugais, victime d’un accident à Saint-Jean en mai 2019, alors qu’il avait consommé de l’alcool. Me Desailloud note que les gendarmes, trompés sans doute par leur logiciel, ont enregistré “Saint-Jean, Istres”, pour situer les faits. « Un facteur de nullité », selon l’avocate, mais pas selon le procureur qui cite « une erreur matérielle. » Même traitement que le cas précédent, délibéré le 3 décembre.

 

Journal de Saint-Barth N°1392 du 07/10/2020

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