Suite du feuilleton judiciaire autour du nom de l’aéroport Remy de Haenen. Comme le tribunal administratif, la cour administrative d’appel de Paris a donné raison au Président de la Collectivité.
Nouvelle étape dans le feuilleton politico-judiciaire autour du nom de l’aéroport. La cour administrative d’appel de Paris vient de rejeter l’appel de Jean-Pierre Magras contre l’appellation Rémy de Haenen. Elle a donc suivi la décision rendue par le tribunal administratif en octobre 2017 en validant ce nouveau nom, déjà inscrit sur la façade et à l’entrée de l’infrastructure.
Jean-Pierre Magras demandait l’annulation de la délibération du conseil territorial pour différents motifs. La compétence, déjà, de la Collectivité à décider du nom d’un aéroport français, plutôt que le ministre chargé de l’aviation civile. La cour d’appel a écarté cet argument : le nom de l’aéroport reste officiellement “Aéroport de Saint-Barthélemy”, celui de Rémy de Haenen est accolé comme nom commercial et touristique. Il s’appelait auparavant Gustaf III ; mais cette dénomination « choisie en 1983 alors que Saint-Barthélemy était encore une commune n’était jamais allée au bout au niveau la préfecture de Guadeloupe », explique Me Arezki Chabane, conseil de Jean-Pierre Magras. Les magistrats ont donc considéré que la Collectivité ne procédait pas à un changement de nom mais au simple ajout d’un nom commercial. « Il est pourtant incontestable qu’il s’appelle Gustaf III… »
Outre ce point administratif, le requérant dénonçait “une erreur manifeste d’appréciation” du conseil territorial, arguant que le choix du nom de Rémy de Haenen n’était motivé par aucun intérêt public local et portait atteinte au principe de neutralité. MeChabane comptait sur de nouveaux documents apportés à la cour, concernant les agissements présumés troubles de l’ancien maire de l’île durant la seconde guerre mondiale (JSB 1238) . « Il n’avait pas été directement poursuivi, mais avait été interrogé dans le cadre d’une procédure pour savoir qui fournissait des denrées alimentaires à l’armée allemande. Il a fait l’objet de soupçons importants de l’armée américaine», assure Me Chabane. Les pièces apportées ont été jugées insuffisantes par les magistrats pour conclure à une erreur manifeste d’appréciation.
Enfin, ces derniers ont considéré qu’il n’y avait pas de conflit d’intérêt dans le fait que le fondateur de la compagnie aérienne Saint-Barth Commuter modifie la dénomination de l’aéroport où est basée son entreprise, puisque ni la gestion ni l’exploitation de l’infrastructure ne sont concernées. Cette décision est, en particulier, un motif de satisfaction pour Bruno Magras.
Au Conseil d’Etat ?
Jean-Pierre Magras et son conseil Me Arezki Chabane se laissent désormais le temps de l’analyse des conclusions de la cour administrative d’appel de Paris, avant de décider s’ils portent l’affaire en cassation devant le Conseil d’Etat.
Pour mémoire, en 2015, le Président de la Collectivité avait proposé au conseil territorial de changer le nom de l’aéroport de Gustaf III en Rémy de Haenen, considérant que le roi de Suède n’avait pas de lien avec l’aviation sur l’île, contrairement à l’ancien maire, premier à y avoir posé un avion en 1945. Cela avait déclenché un vif débat même parmi ses rangs, pas très chauds pour honorer à ce point le fondateur de l’Eden Rock et ancien membre du Front National, contre qui la population s’était retournée en 1975 (JSB 1133, 1134, 1135).
Le conseil territorial avait d’abord refusé la proposition, s’accordant pour nommer la salle d’embarquement du nom de Remy de Haenen. A la réunion suivante, le 26 juin 2015, le Président avait de nouveau soumis la question aux débats, insatisfait par le compromis, et cette fois l’aéroport avait bien été nommé Remy de Haenen.
JSB 1350