Jeudi dernier s’est tenue une audience du tribunal correctionnel de proximité dans la grande salle de la capitainerie, à Gustavia. Peu de dossiers mais des affaires courantes sur l’île de Saint-Barthélemy avec des conduites en état d’ébriété et sous produits stupéfiants ainsi qu’un vol de bijoux dans une boutique d’hôtel.
Le 7 janvier dernier, il est environ 5 heures du matin quand une jeune femme âgée de 23 ans perd le contrôle de son scooter et chute violemment. Gravement blessée à un genou, elle est rapidement prise en charge par les secours que son compagnon, qui la suit sur son deux-roues, appelle immédiatement à l’aide après l’accident. Quand les gendarmes procèdent aux tests de contrôle sur la blessée, ils constatent qu’elle affiche un taux de 3,11 grammes d’alcool par litre de sang. « Un taux exceptionnel, se lamente la présidente du tribunal. Je n’ose imaginer votre état et je me demande comment vous êtes parvenue à monter sur votre scooter. » La magistrate remarque que la prévenue n’a jamais eu affaire avec la justice. « Et bien, pour une entrée en matière, vous frappez fort », gronde la juge.
Lors de son audition, la jeune femme explique avoir bu de la Téquila, de la Vodka et d’autres alcools avant d’aller en discothèque. « Je ne me sentais pas en état d’ivresse pendant la soirée, assure-t-elle. Je consomme de l’alcool comme tout le monde, de temps en temps. » La procureure de la République bondit et lance : «Pour arriver à monter sur un scooter, le démarrer et rouler dessus avec plus de trois grammes dans le sang, il faut avoir l’habitude de boire ! Pour une femme du gabarit de madame, à trois grammes, normalement, on est dans le coma. » La prévenu reconnaît quand même qu’elle n’a aucun souvenir de son accident. «C’est le trou noir, je ne me souviens de rien », souffle-t-elle. Serveuse, elle effectue sa première « saison » à Saint-Barth. Elle est condamnée à une peine de trois mois de prison avec sursis. Son permis de conduire est suspendu pour une durée de six mois.
Son compagnon est également convoqué à l’audience. S’il a appelé les secours et a accompagné son amie jusqu’à l’hôpital, il a refusé de se soumettre au test d’alcoolémie. « Je n’ai pas compris pourquoi les gendarmes m’ont demandé de faire le test, je n’étais que l’accompagnateur », explique-t-il à la barre du tribunal. Il affirme qu’il a essayé d’empêcher son amie de prendre son scooter, notamment en lui confisquant les clefs. «Mais on s’est pris la tête et elle est partie », ajoute-t-il. Le problème pour le jeune homme, également saisonnier, est qu’il a déjà été condamné à deux reprises pour des faits de conduite en état alcoolique en 2017 et 2018 dans l’Hexagone. La procureure requiert deux mois de prison ferme. Le prévenu se décompose lorsqu’il entend les réquisitions. Finalement, le tribunal choisit de le relaxer.
Alcool dans le sang, cocaïne dans les poches
Le prévenu suivant est à peine plus vieux que les précédents. Agé de 27 ans, il travaille et vit sur l’île. Le 11 février dernier, vers 3h45, une patrouille de la gendarmerie le voit circuler sur son scooter dans Gustavia, mais pas très droit. Le deux-roues est arrêté. Le conducteur a des difficultés à s’exprimer distinctement et cherche ses papiers de manière désordonnée. A tel point qu’en fouillant ses poches, il laisse tomber un sachet contenant de la cocaïne. Selon les gendarmes, celui-ci contient 1,3 grammes de la poudre blanche. « Je sortais de discothèque et j’ai récupéré mon scooter que j’avais garé devant mon travail, explique le prévenu. J’ai pris un rail de coke chez un ami avant de partir mais c’était la première fois. » Lorsque les gendarmes l’interrogent sur la provenance de la drogue, il assure qu’il ne connaît pas la personne qui lui en a vendu. « Mais vous dites que vous en achetez toujours auprès de lui », remarque malicieusement la présidente du tribunal. « Oui je n’en achète que tous les six mois », réplique le prévenu. La magistrate sourit. « Ah, maintenant ce n’est plus une consommation unique mais tous les six mois », s’amuse la juge.
Parallèlement, un test révèle que le jeune homme présente un taux d’alcoolémie de 2,42 grammes par litre de sang. Là encore, il affirme ne boire que très occasionnellement. Et jamais avant de prendre le guidon. « C’est formidable à Saint-Barth, les gendarmes n’arrêtent que des primo-délinquants », ironise la procureure qui requiert six mois de prison avec sursis et dix mois de suspension de permis de conduire. Le tribunal inflige une peine de 4 mois d’emprisonnement avec sursis et six mois de suspensions du permis au prévenu.
« Piéger » par des collègues
La présidente demande au prévenu suivant : « Avez-vous un problème avec l’alcool ? » L’homme de 45 ans répond : « J’ai arrêté, comme les stupéfiants. Mais ce jour-là, je me suis fait «piéger » par des collègues. Et comme je ne pouvais pas dormir sur place... » Il a pris la décision de rentrer chez lui à scooter. C’était le 19 janvier dernier. Sur la route du retour, vers 22 heures, il tombe sur une patrouille de la gendarmerie à Saint-Jean. Conduit à la gendarmerie, il souffle dans l’éthylomètre qui détecte un taux de 0,70 milligramme d’alcool par litre d’air expiré (soit 1,4 gramme d’alcool par litre de sang). « Le plus inquiétant est qu’au moment des faits, monsieur ne titube pas, parle clairement, ce qui montre une habitude », souligne la procureure. Déjà condamné à trois reprises pour des faits similaires en 2005, 2013 et 2017, le prévenu écope d’une peine de 3 mois de prison avec sursis assortie d’une obligation de soin et d’une annulation de son permis de conduire.
La retraitée de Philadelphie barbote des bijoux
Le dossier suivant concerne une prévenue qui n’est autre qu’une touriste étasunienne. « Elle a été visée par des convocations à plusieurs reprises », précise la présidente du tribunal, qui ajoute que l’intéressée est native de Philadelphie et vit aux Etats-Unis. Le 20 février dernier, deux colliers en nacre et une paire de lunettes de soleil sont dérobés dans la boutique d’un hôtel de Saint-Barthélemy. La directrice de l’échoppe est présente à l’audience. Elle explique qu’après avoir été avertie de la « disparition » des objets par l’une de ses employées, elle a visionné les images captées par les caméras de surveillance de la boutique. «Sur les photographies, la scène est assez éloquente », commente la juge. De fait, on peut y voir la prévenue manipuler les objets volés.
La directrice mène sa « petite enquête » et parvient à remonter jusqu’à la villa où logent la prévenue et sa fille, ensemble sur la vidéo de la boutique. Les gendarmes sont alertés et procèdent à une perquisition dans la villa. Ils ne retrouvent pas les colliers et la paire de lunettes de soleil mais une série d’objets pour le moins suspects. « La prévenue n’est pas poursuivie pour cela mais ça donne une coloration à ce dossier », insiste la présidente. Confrontée aux photos de la boutique sur lesquelles elle apparaît, la prévenue nie avec fermeté. « J’ai montré les colliers à ma fille, j’ai pris les lunettes dans mes mains, mais c’est tout », assure-t-elle aux gendarmes. Agée de 67 ans, la retraitée est condamnée à une peine d’amende de 2.800 euros à laquelle s’ajoute 3.004 euros à verser à la victime, ce qui correspond au montant des marchandises volées.
De la prison ferme pour le chauffard de Gustavia
Le 18 février dernier, un homme a été interpellé après une longue course-poursuite au volant d’une voiture volée dans les rues de Gustavia. Une folle équipée qui n’avait, fort heureusement, fait aucune victime. L’homme avait pu être arrêté grâce à l’intervention de la population qui était parvenue à stopper son véhicule puis à le neutraliser avant l’arrivée des gendarmes. Transféré à Saint-Martin puis en Guadeloupe, l’homme d’une cinquantaine d’années a été placé en détention provisoire jusqu’à son procès. Celui-ci s’est tenu le mardi 5 avril à Basse-Terre. Le prévenu a été condamné à une peine de 18 mois d’emprisonnement dont 12 assortis d’un sursis. Il a été maintenu en détention. De plus, il a écopé d’une peine d’interdiction de conduire tout véhicule pendant une durée de deux ans.