Photo > Le comité Ifrecor : Didier Laplace (Coral Restoration), Francius Matignon (Collectivité), Heike Dumjahn (ATE), Nathalie Lédée (Reef for life), Claude Bouchon (Université des Antilles), Julien Chalifour (réserve naturelle de Saint-Martin), Antoine Lechevalier (DEAL Guadeloupe), Marie Angèle Aubin (Collectivité), Flora Artzner (ATE), Ingénu Magras (service maritime de la Com), Micheline Jacques (Collectivité), Michael Wéry (affaires maritimes), Stéphan Poujol (représentant des clubs de plongée et Sea Shepherd Dive), David Malespine (Association des pêcheurs de Ouanalao), Sébastien Gréaux (directeur de l’ATE), Turenne Laplace (Ouanalao Reef).
Vendredi, toute la journée, tous les acteurs de l’environnement maritime se sont réunis autour d’une même table pour la création du comité Ifrecor de Saint-Barthélemy. L’île intègre le réseau national pour la préservation des récifs coralliens.
Première réunion qui acte la création du comité Ifrecor de Saint-Barthélemy. L’Ifrecor (Initiative française pour les récifs coralliens) a été créée en 1990 par le gouvernement, quand la France a réalisé que ses eaux contenaient 10% des récifs coralliens du monde, répartis dans chaque bassin océanique. Une biodiversité aussi riche que fragile. Vendredi, une longue liste d’acteurs de la mer s’est réunie à l’hôtel de la Collectivité pour une première journée de travail sur la défense des coraux.
Objectifs pas trop ambitieux
Concrètement, il s’agit de « développer un plan d’action pour la protection des récifs coralliens de Saint-Barthélemy », explique Micheline Jacques, vice-présidente en charge de l’environnement, en préambule. « Nous allons nous fixer une série d’objectifs, sans aller dans des choses trop ambitieuses car mieux vaut dépasser ses objectifs que ne pas les atteindre. »
« Il y a une vraie continuité entre les herbiers, la mangrove et les récifs », rappelle Flora Artzner, spécialiste du milieu marin à l’Agence territoriale de l’environnement. « Le premier objectif du comité Ifrecor est de nous rencontrer, pour ensuite déterminer une liste d’actions concrètes. Pour ce lancement, nous bénéficions d’une enveloppe de moins de 10.000 euros. Ce n’est pas extraordinaire mais il ne faut pas s’arrêter à cela. Derrière, un plan d’action défini nous permettra de solliciter d’autres financements. » Sébastien Gréaux, directeur de l’ATE, a rappelé ce qui a déjà été fait pour les coraux, et en premier lieu, la création de la réserve naturelle en 1996, avec tous les suivis scientifiques qu’elle implique. Ensuite, la réglementation de la pêche mise en place en 2015. Enfin, les nombreuses actions de sensibilisation mises en place avec les écoles de Saint-Barthélemy.
Les coraux génèrent
30 millions d’euros par an
Il explique que selon une étude menée par l’Ifrecor en 2016 (*), les récifs coralliens de Saint-Barthélemy représentent pour l’île plus de 30 millions d’euros chaque année. Un calcul qui croise les bénéfices en termes touristiques (26 millions d’euros), de la pêche (2 millions d’euros), et de la protection côtière (3 millions d’euros).
Une fois le cadre posé, plusieurs intervenants présentent leur travail : Claude Bouchon, chercheur en biologie marine à l’université des Antilles, détaille les résultats du suivi de la réserve naturelle de Saint-Barthélemy, dont il est chargé avec son épouse Yolande Bouchon-Navaro, également biologiste.
Ils constatent une dégradation progressive mais très lente sur les sites suivis, Coco et Pain de Sucre. Avec 45 espèces de coraux et 144 espèces de poissons sur ces deux sites, « la biodiversité reste importante compte tenu de la taille de l’île. La situation est bien meilleure à Saint-Barthélemy que dans les eaux de Guadeloupe et Martinique. On subit ici le déclin global des récifs coralliens. » Autre bonne nouvelle, le poisson lion n’a pas tellement d’impact sur les coraux à Saint-Barthélemy ; et Irma n’a causé de réels dégâts que sur une profondeur restreinte de 0 à 5 mètres. Tout ce qui est en dessous n’a pas trop souffert.
En revanche, l’ouragan a porté un coup de frein au projet de Turenne Laplace, président de Ouanalao Reef, qui a présenté la technologie Biorock qu’il utilise à Pointe Milou. Il s’agit d’accélérer la pousse du corail grâce à des impulsions électriques. Le projet est en train d’être relancé.
Nathalie Lédée, médecin et présidente de l’association Reef of Life, utilise la même technique de façon « beaucoup plus modeste », explique-t-elle. Selon les images retraçant trois ans d’immersion de sa structure, en baie de Saint-Jean, les premiers résultats encourageants sont là.
Enfin, Didier Laplace, président de Coral Restoration, présente ses nurseries de coraux, le travail de nettoyage et de sensibilisation des enfants et pêcheurs de l’île mené par l’association.
Après cela, les acteurs séparés en trois groupes prennent part à des ateliers pour lister les idées de chacun sur la prévention, la protection, la sensibilisation. Le thème de l’eau, de l’assainissement au dessalement, en passant par la récupération des eaux de ruissellement, revient fréquemment. La communication auprès des touristes et habitants aussi. In fine, les suggestions sont nombreuses, chaque participant a des idées pour protéger mieux encore la biodiversité sous-marine. Reste à voir comment elles peuvent intégrées au futur code de l’environnement et surtout, à terme, être appliquées.
(*) « Valeur économiques des services rendus par les récifs coralliens et écosystème associés des outre-mer », Nicolas Pascal, 2016. www.ifrecor.fr.