Il faudra bien plus d’une année pour évaluer les conséquences et les résultats définitifs de la réhabilitation de l’étang de Saint-Jean, inauguré en juin 2019. L’Agence territoriale de l’environnement suit de près l’évolution du site. Point d’étape.
Il y a un peu plus d’un an, Bruno Magras et la préfète Sylvie Feucher coupaient le ruban sur le deck de l’étang de Saint-Jean, en présence des co-financeurs de sa réhabilitation, Jim Boos pour Roman Abramovitch et David Matthews pour l’Eden Rock. L’aboutissement d’un projet à 6,5 millions d’euros au total, qui a connu de grosses difficultés avec le passage de l’ouragan Irma.
Avant d’offrir un joli lieu de promenade, l’objectif de la remise en eau de cet étang était d’en faire un lieu sain pour la biodiversité et un site prisé des oiseaux. Auparavant, quand l’étang s’asséchait, les poissons étouffaient dans une mare et développaient des maladies, qui tuaient ensuite les oiseaux. « On a perdu une vingtaine de couples de pélicans une année, à cause du botulisme », rappelle Sébastien Gréaux, directeur de l’Agence territoriale de l’environnement. « Il ne faut pas oublier que l’étang était un lieu de perte de biodiversité. »
L’ATE effectue un suivi étroit de l’évolution de l’étang de Saint-Jean, de sa faune et sa flore. « Dans la mangrove, on voit des choses très positives puisqu’on constate déjà de la reproduction chez les quatre espèces de palétuviers plantés il y a deux ans », indique Sébastien Gréaux.
Côté animaux aquatiques, les agents ont dénombré quarante-deux espèces, dont trente-et-une nouvelles espèces, c’est à dire qui n’étaient pas vues dans l’étang auparavant. Elles sont entrées par les buses qui relient l’étang à la mer, via le canal. Colas, poissons perroquets, anémones… Certaines espèces sont restées, et d’autres ont disparu : c’est le cas d’une anguille, de deux espèces de crabes et de deux espèces d’escargots. Les poissons morts que l’on croise de temps à autre sur les bords de l’étang sont des tilapias. Cette espèce invasive originaire d’Afrique supporte mal la salinité trop élevée de l’eau (JSB 1344).
Les oiseaux toujours attendus
Côté oiseaux, là aussi, chaque semaine l’ATE réalise un inventaire des espèces présentes, et compare avec les comptages effectués avant réhabilitation. « L’effectif est stable, voire en baisse », explique Sébastien Gréaux. « On a moins vu de pélicans en chasse par exemple. Cela peut être lié à l’activité humaine, l’étang étant devenu un lieu de vie pour les habitants de Saint-Barth. » D’où l’importance de respecter les consignes : ne pas courir sur le deck, éviter de crier, s’agiter ou mettre de la musique… Il faudrait considérer ce lieu comme un site d’observation de la nature, et pas comme un lieu d’activité. Mais à terme l’ATE compte sur la végétation. « Quand la mangrove aura poussé, elle fera office de rideau entre l’étang et le deck. Et les îlets remplissent déjà leur rôle de refuge. » Il faut souligner qu’une année d’expérience est tout à fait insuffisante pour tirer un bilan définitif. « Les oiseaux ne sont pas revenus en masse, mais on manque de recul pour conclure quoi que ce soit », poursuit Sébastien Gréaux. « Et on a vu de belles observations : les parulines jaunes, espèce inféodée aux mangroves, sont présentes ; un couple de petites sternes est en train de nicher –c’est une espèce très fragile, on attend le résultat avant de crier victoire-, on a observé le nid d’un colibri… »
Et dans la baie de Saint-Jean, désormais reliée à l’étang par les conduites, quels changements ? La qualité de l’eau, mesurée chaque mois par l’ARS, est conforme à la baignade. « La Collectivité analyse chaque mois quatre points dans l’étang et deux dans la baie de Saint-Jean. Nous réalisons mensuellement des analyses complémentaires dans les autres étangs de l’île et dans les baies en réserve. Ce mois-ci nous avons prélevé aussi dans la baie de Saint-Jean car un des membres de notre Conseil d’administration nous a dit que la qualité de l’eau y était mauvaise, selon des analyses faites par un privé et dont nous n’avons pas pu avoir les résultats. Nous aurons les résultats dans quelques jours», détaille Sébastien Gréaux. Enfin, les tuyaux qui relient l’étang à la mer ont tendance à se boucher, ce qui paraît assez inévitable. D’ailleurs dans le canal on voit des grappes de sargasses entrées par les buses, qui forcément les obstruent. « Régulièrement, on doit curer », indique la directrice des services techniques Sophie Durand-Olivaud. « La solution est de mettre des bouchons côté mer, fermer la trappe entre le canal et l’étang, pomper l’eau de mer dans le canal. Une fois sec, on enlève les bouchons et la pression de l’eau de mer nettoie les tuyaux. Pour l’instant nous n’avons pas d’autre solution.»