Le rapport du Giec sur les océans laisse entrevoir un sombre avenir pour la planète en général, et pour les îles en particulier. Montée du niveau des océans, super-cyclones plus fréquents, raréfaction du poisson, recul du trait de côte, dégradation des récifs coralliens…
Le Giec (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) tire une nouvelle fois la sonnette d’alarme. Le rapport rendu mercredi 25 septembre porte spécifiquement sur les océans et la cryosphère (l’ensemble de la surface du globe recouvert de glace, des montagnes aux Pôles), « éléments indispensables de la vie sur Terre ». Sans surprise, le constat est funeste. « L’océan se réchauffe, devient plus acide et moins fécond. La fonte des glaciers et des calottes glaciaires entraîne une élévation du niveau de la mer et les phénomènes côtiers extrêmes sont de plus en plus intenses», indique l’introduction de ce rapport qui synthétise les résultats de près de 7.000 études scientifiques. « Si nous réduisons fortement les émissions, les conséquences pour les populations et les moyens d’existence n’en seront pas moins éprouvantes », précise le président du Giec Hoesung Lee, « mais elles pourraient être plus faciles à gérer pour les populations les plus vulnérables. » Les habitants de Saint-Barthélemy, insulaires et sur la trajectoire des cyclones, en sont.
La hausse du niveau des océans s’accélère. De 15 centimètres à l’échelle mondiale au cours du XXe siècle, elle est aujourd’hui deux fois plus rapide. « Cette hausse pourrait atteindre 30 à 60 cm d’ici 2100, et ce même si les émissions de gaz à effet de serre sont fortement réduites et si le réchauffement planétaire est limité à une valeur bien en dessous de 2 °C. Mais elles atteindront environ 60 à 110 cm si ces émissions continuent d’augmenter fortement.» Un mètre dix de plus dans quatre-vingt ans ; on vous laisse imaginer les conséquences à Gustavia et dans la zone industrielle de Public, notamment.
Virginie Duvat, géographe, est l’une des 104 auteurs de ce rapport. Interrogée par le quotidien Libération, elle affirme que les outre-mer seront les premiers touchés par les effets du réchauffement climatique sur les océans. « L’élévation du niveau de la mer, le réchauffement et l’acidification des océans, ainsi que l’intensification des tempêtes vont combiner leurs effets sur ces territoires », explique-t-elle. « On prévoit une hausse de la fréquence des cyclones de catégorie 4 à 5, avec des vagues de 6 à 9 mètres, et des vents de plus de 300 kilomètres heures en rafales. (…) Dans la zone intertropicale, les littoraux dépendent beaucoup d’écosystèmes sensibles, comme les récifs coralliens et les mangroves, pour amortir les assauts des vagues et des tempêtes. Les récifs produisent également les sédiments qui alimentent les côtes. Or, d’ici à 2040-2050, à cause du réchauffement et de l’acidification des océans, leur capacité à remplir ces fonctions se sera considérablement affaiblie. » Donc, les cyclones seront plus fréquents et plus forts, sur des territoires plus vulnérables sans leurs barrières coralliennes, leurs mangroves et leurs dunes.
Le rapport du Giec détaille le futur de la planète selon deux scénarios : un premier au cours duquel l’objectif des accords de Paris de maintenir le réchauffement sous la barre des 2°C est atteint ; un autre au cours duquel les émissions restent à peu près au niveau actuel. Y a-t-il encore une chance de tenir l’objectif ? «Nous ne pourrons maintenir le réchauffement planétaire nettement en dessous de 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels que si nous mettons en œuvre des transitions sans précédent dans tous les secteurs de la société, y compris l’énergie, les terres, les écosystèmes, les zones urbaines, l’infrastructure et l’industrie », estime Debra Roberts, co-présidente de ce groupe de travail du Giec.
JSB 1344