Pour les 77 élèves de troisième du collège Mireille Choisy, la deuxième semaine du séjour dans l’Hexagone a rimé avec culture. Assemblée nationale, l’université de la Sorbonne ou cité des Sciences et de l’Industrie, le programme était chargé. Notre collaboratrice Albane Harmange les a suivis lors de leur visite du Sénat.
Devant le 15 rue Vaugirard, une voiture s’arrête en double-file. Difficilement, deux adolescents tentent de s’extraire de l’habitacle avec des béquilles. Leurs affaires sous le bras, ils sont soutenus par leur professeure d’histoire et de géographie pour atteindre l’entrée du Sénat. « Il y a eu un blessé le premier jour au ski, et l’autre le deuxième jour », soupire l’une des neuf encadrantes du voyage. Blessure oblige, les deux élèves de troisième du collège Mireille Choisy pénètrent dans l’enceinte de l’institution sans attendre leurs camarades.
Le groupe imposant s’amasse devant le Sénat avec quelques minutes de retard. « Le métro avec 80 collégiens, c’est compliqué » résume Emilie, la présidente de l’association des parents d’élèves (APEL). Une longue litanie de prénoms s’engage alors pour distribuer à tous les élèves et les adultes accompagnateurs un autocollant jaune, indispensable pour pénétrer dans la chambre haute du Parlement. Une fois les précautions de sécurité effectuées, le groupe se sépare en deux le temps de la visite.
Un lieu historique
« Hier, on est allé à l’Assemblée nationale, c’était super joli », se souvient Gaïa, une des élèves, avant de rejoindre les autres collégiens. Le demi-groupe est rassemblé dans la cour d’honneur du Palais du Luxembourg, autour de deux femmes en uniforme noir. Ces deux agents de service du Sénat sont chargées d’assurer la visite de cette institution historique. Sous la commande de Marie de Médicis, le Palais du Luxembourg est construit par l’architecte Salomon de Brosse entre 1615 et 1631. Il prend en 1799 le statut de Sénat, qu’il conserve jusqu’à aujourd’hui.
Dans les recoins de bâtiment, des télévisions côtoient les statues antiques. « C’est pour permettre aux sénateurs de savoir quand ils vont intervenir », explique l’agent dans son uniforme noir. Dans les couloirs feutrés, les collégiens croisent des ouvriers et des huissiers avec leurs chaînes en argent. Des pancartes aux noms des présidents et des vice-présidents ornent les portes. « Si je vous demande d’être silencieux c’est parce que le Sénat est un lieu historique, mais aussi un lieu de travail », lance à l’assemblée un des agents avant de demander : « Comment s’appelle le président du Sénat ? » Un lourd silence s’abat. Les collégiens sont occupés à prendre en photos les tableaux et le mobilier de l’antichambre du vice-président du Sénat. « C’est Gérard Larcher », répond l’agent quelques secondes plus tard.
Lors des traversées de couloir pour atteindre les différentes pièces, des « chut ! » se font entendre. « Mettez vos téléphones en silencieux », réclame une des encadrantes. Lorsque le groupe pénètre dans la salle du livre d’or, le silence s’impose de lui-même. Les élèves lèvent la tête, et leur téléphone, pour admirer les nombreuses peintures entourées d’or. « Au-dessus de votre tête, vous avez un tableau qui met en scène Marie de Médicis en train de rétablir la paix en France, explique l’agent. Et vous voyez ce buste, d’après vous qui est-ce ? » « Marie de Médecis », répondent en chœur les collégiens. « Toute la pièce est en or ? », demande une élève. « Il s’agit de feuille d’or, répond une des responsables de la visite. C’est l’équivalent de 400 grammes, donc ce n’est pas avec ça que tu pourras devenir riche ».
« J’espère que le peintre a été bien payé »
« C’est beau », souffle un élève à l’intention de son professeur d’EPS, une fois rendu dans la salle des conférences. Lustres, statues et tapis rouge, la décoration en met plein la vue. Assises sur un fauteuil rouge rembourré, Valentine et Océane admirent les nombreuses peintures qui ornent la pièce. « J’espère que le peintre a été bien payé pour faire tout ça », déclare la première. Des journalistes de la chaîne Public Sénat mettent à profit la beauté de cette pièce pour tourner une séquence. «C’est par ici que passent les sénateurs quand ils sortent de l’hémicycle, précise l’agent. C’est pour ça qu’il y a souvent des journalistes. »
« Personne n’a le vertige ? », plaisante l’agent du Sénat. Intrigués, les collégiens secouent la tête de droite à gauche. La petite troupe monte avec enthousiasme les marches pour atteindre la salle la plus attendue : l’hémicycle. Installés au balcon le plus haut, les élèves de troisième surplombent les 348 sièges des sénateurs. Entre les fauteuils rouges de différentes tailles, « selon la corpulence du sénateur » précise l’agent, des employés passent l’aspirateur. Dans le petit hémicycle qui accueille habituellement le président du Sénat, des visiteurs se prennent en photo le sourire aux lèvres.
Les collégiens postent des vidéos de l’hémicycle sur leurs réseaux sociaux et font des signes à l’autre groupe posté dans le balcon d’en face. « À quoi sert le Sénat ? », questionne l’agent. « C’est le pouvoir législatif », répond Eddie Popotte, professeur de physique-chimie. « Les sénateurs représentent les collectivités territoriales, ils sont placés dans l’hémicycle selon leur groupe politique », explique l’agent avant de montrer du doigt l’emplacement de Micheline Jacques. Sa présence étant requise pour un conseil territorial à Saint-Barth, la sénatrice n’a pas pu accompagner les collégiens lors de la visite.
Une visite «enrichissante»
« Je n’ai pas tout compris du fonctionnement, mais l’architecture des pièces était impressionnante », résume Tristan dans la boutique de souvenirs. Les collégiens se serrent au-dessus des vitrines exposant stylos et autres objets du Sénat. « C’était très enrichissant, s’enthousiasme Romance, après avoir immortalisé le bâtiment sous tous les angles. Il faudrait écrire un livre pour pouvoir tout expliquer. » Leur professeure d’histoire et de géographie s’amuse : « Vous saviez déjà certaines choses grâce à vos cours d’histoire. »
« Après la première semaine au ski, celle à Paris est davantage tournée vers la culture, expose Cyril Panot, principal-adjoint du collège Mireille Choisy. Les visites ont été planifiées pour coller à leur programme d’histoire, et aussi pour les préparer au diplôme national du brevet qui arrive à la fin de l’année. » L’examen semble pourtant bien loin des préoccupations. La priorité ? Profiter du voyage. « C’est sympa qu’on puisse sortir de notre île, sourit Marin. On découvre un monde nouveau. » Le lendemain, les collégiens sont partis, notamment, à la rencontre de l’université de la Sorbonne. Avant de prendre, samedi, le chemin du retour vers Saint-Barth. Des souvenirs plein la tête.