Pour des adolescents âgés de 12 à 15 ans, se prendre de passion pour la vie des mangroves n’a rien de très ordinaire. Toutefois, lorsqu’ils se font littéralement embarquer par des enseignants passionnés dans un projet scientifique qui les plonge dans une nature qui, à bien y réfléchir, leur est encore inconnue, il est plus aisé d’envisager la naissance d’une telle passion. Telle est, négligemment résumée, la genèse de l’aventure à laquelle participent dix-huit élèves du collège Gourdeliane de Baie-Mahault, en Guadeloupe, depuis plus d’un an. La semaine dernière, accompagnés de leurs cinq professeurs, ils sont dix-huit à s’être plongés dans l’étude de la nature de Saint-Barthélemy. Avec un enthousiasme débordant.
Mangrove Bleue est le nom du projet qui réunit des élèves de 5e, de 4e et de 3e depuis l’année dernière. « On était 21 l’an dernier mais certains sont partis alors maintenant on est 18», lance l’une des scientifiques en herbe, qui poursuit : « On a choisi la mangrove parce qu’elle est très présente en Guadeloupe, qui compte quatre espèces de palétuviers. » Leurs études ont conduit les collégiens jusqu’à Marie-Galante, où ils sont allés à la rencontres des élèves du collège Nelson Mandela. « On a aussi participé à la Journée académique de l’éducation au cours de laquelle on a gagné deux prix, se félicite un adolescent. Celui du jury et celui des élèves. » Rien de tel pour encourager l’esprit de découverte et la curiosité. A Saint-Barth, comme ils l’ont fait à Marie-Galante, les collégiens de Gourdeliane ont échangé avec leurs camarades de l’établissement local. En l’occurrence, Mireille Choisy. Mais ils ont aussi et surtout minutieusement rédigé un journal de bord de toutes leurs « découvertes ». En français et en espagnol, car le projet se veut aussi bilingue. «On a participé à des expériences de science participative, souligne un élève. Cela consistait à enterrer des mangroves et à observer leur décomposition. » Sans oublier les visites guidées de sites avec des scientifiques, comme ils ont pu le faire à Saint-Barth avec l’Agence territoriale de l’environnement qui leur a permis de se plonger dans les fonds marins mais également de partir à la découverte de la faune et de la flore en général et des mangroves en particulier. « On apprend plein de choses, sourit une collégienne. On apprend à se connaître aussi. » Car, il faut bien l’avouer, tous n’étaient évidemment pas férus de mangrove avant d’intégrer le projet.
« Je n’avais jamais cherché à comprendre », explique une adolescente, que sa participation à la Mangrove Bleue a éveillé à la protection de la nature. « Il y a des lieux très urbanisés qu’on a laissé de côté, constate-t-elle. Il faut arrêter de construire et préserver ces lieux. » Les sourires des cinq enseignants laissent entrevoir leur satisfaction, bien légitime, à être parvenus à entraîner leurs élèves dans cette aventure éducative. « Et puis on fait plein d’autres choses, précise un collégien. De la soudure, de la technologie, de la physique, de la chimie, de l’espagnol… On a appris du vocabulaire que l’on n’apprend pas forcément en cours. Ça nous fait voir d’autres choses, d’autres points de vue. » Une camarade renchérit : « On travaille dans une ambiance calme, posée, tout le monde se serre les coudes. Et comme il n’y a que des volontaires, il n’y a personne pour déranger les autres. » Une énergie positive et constructive qui est perceptible à la vision des petites capsules vidéo réalisées par les élèves sur la faune, la flore et… la mangrove, bien entendu. « Moi, plus tard, je veux être scientifique », déclare, plein d’assurance, un collégien du groupe. A observer les hochements de tête de ses camarades, nul doute qu’il n’est pas le seul à nourrir une telle ambition. A moins que certains ne se destinent à la création de jeux éducatifs. Comme ce crabe géant, électronique et portatif conçu par les élèves du projet Mangrove Bleue pour découvrir, en jouant, les spécificités de cet écosystème si particulier.