Le ton est donné. «Nous, représentants des parents d’élèves de l’école primaire de Gustavia, exprimons notre profonde indignation et notre vive inquiétude quant à une rentrée scolaire qui s’annonce désastreuse. » A quelques mois de la rentrée scolaire 2025, les parents délégués de l’école primaire de Gustavia diffusent un communiqué pour alerter la population, les élus et le rectorat face au manque d’enseignants dans leur école.
Des remplacements non assurés
Cette année, l’école primaire de Gustavia est parvenue à avoir un enseignant pour chacune de ses 18 classes. Cependant, certains postes étaient occupés par trois enseignants remplaçants, « ce qui signifie qu’aucun enseignant n’a pu assurer les remplacements de courte durée », indique le communiqué. Sans possibilité de remplacer ces absences, des classes se sont retrouvées sans enseignants relatent les parents d’élèves. Pire, l’enseignant spécialisé “maitre E”, « normalement dédié aux élèves aux besoins spécifiques, est régulièrement mobilisé pour remplacer des enseignants absents ». Comme les années précédentes, les parents d’élèves et le groupe scolaire ne sont pas resté inactifs face à cette situation. Ils ont sollicité le rectorat à plusieurs reprises, en leur proposant directement des profils d’enseignants qualifiés et disponibles. Une enseignante titulaire en disponibilité résidant à Saint-Barthélemy s’est portée volontaire pour prendre un poste, mais son recrutement est bloqué pour des raisons administratives. Une institutrice originaire de Belgique, voit son dossier immobilisé depuis des mois malgré toutes les démarches réalisées pour faire reconnaitre son diplôme. A trois reprises, les parents d’élèves ont envoyé un courrier au vice-recteur et à la rectrice pour les informer de la situation. Des demandes restées sans réponse. « Ce mutisme administratif reflète un mépris inacceptable pour l’éducation de nos enfants et pour les efforts de la communauté éducative locale », assène le communiqué.
Des candidatures bloquées
La rectrice de l’académie de Guadeloupe, Christine Gangloff-Ziegler, a toutefois répondu à nos sollicitations. «Sur cette année, les enfants sont pris en charge, avance la rectrice. Il y a un enseignant devant les élèves, et les remplacements, lorsqu'il y avait besoin, ont été effectués. » Concernant les propositions de candidature relayés par les parents d’élèves, Christine Gangloff-Ziegler explique que l’enseignante en disponibilité n’a pas pu être engagée pour des raisons administratives. « Une personne qui est en disponibilité dans son académie d'origine ne peut pas avoir un contrat dans une autre académie », précise-t-elle. Par ailleurs, la candidature de l’enseignante belge «suit son cours », puisque elle doit passer par un processus de vérification de la reconnaissance de son diplôme. Alors qu’elle attendait des documents depuis des mois, l’institutrice aurait reçu en début de semaine des retours.
Départs d’enseignants
Mais l’inquiétude des parents d’élèves ne se cantonne pas à l’année en cours. Fin janvier, ils ont appris le départ de deux enseignants pour la rentrée 2025. Un mouvement naturel à l’Éducation Nationale mais qui effraie les parents en raison de la difficulté à recruter sur l’île. D’autant plus, que les parents délégués affirment qu’aucun poste POP (Poste à Profil) ne sera publié pour la rentrée 2025. Ces postes permettent le recrutement d’enseignants sans passer par le système classique de points, ce qui facilite les affections à Saint-Barth. « L’absence de ces postes en 2025 compromet gravement la rentrée prochaine et laisse présager une situation encore plus chaotique que celle que nous vivons actuellement », déclarent les parents d’élèves. La rectrice de l’académie de Guadeloupe confirme que ces postes particuliers n’ont pas été ouverts pour la prochaine rentrée scolaire. « Si on avait eu la remontée plus tôt de ces demandes de mutation, c'est vrai qu'on aurait pu le passer en poste POP, déclare Christine Gangloff-Ziegler. Mais là, on n'était plus dans les délais. »
Un problème récurrent
Selon les services de la Collectivité, cinq enseignants prévoient de quitter le groupe scolaire pour la rentrée prochaine. Trois d’entre eux étaient logés par leurs propres moyens. Si le rectorat parvient à trouver d’autres enseignants pour reprendre ces postes, y aura-t-il assez de logements ? Cette question n'est pas nouvelle, elle revient chaque année. Et c’est précisément ce que reprochent les parents d’élèves au rectorat qu’ils accusent d’avoir « failli à sa mission » et de mettre «en danger l’instruction des élèves à Saint-Barthélemy.» Ils envisagent même d’explorer des recours juridiques si aucune réponse satisfaisante n’est apportée. De son côté, la rectrice promet « un regard très attentif sur l’ensemble des îles » : « Et bien sûr, Saint-Barth dans ce cadre-là également, puisqu'on connaît les difficultés de logement par ailleurs qui peuvent exister sur l'île. »
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Un médecin scolaire surchargé
Si le rectorat s’est expliqué à la presse, il n’est pas toujours enclin à répondre aux questions des parents d’élèves et des élus. Depuis plusieurs mois, des démarches sont en cours pour augmenter l’offre du médecin scolaire sur l’île. Actuellement, le docteur Clavel est le seul médecin à s’occuper de toutes les écoles de Saint-Martin et Saint-Barthélemy. Une tâche impossible pour un seul homme. Un médecin de Saint-Barth est partant pour assurer quelques heures dans les écoles et donc soulager le Dr Clavel. Ce profil a été présenté au rectorat dès juin l’année dernière, mais depuis, plus aucun retour. Un autre profil aurait finalement été retenu par le rectorat sans en informer la Collectivité qui est pourtant l’instigateur de cette demande. Avoir une psychologue pour tous les établissements scolaires de l’île est aussi une requête en attente.