C’est l’un des secteurs les plus violemment touchés par la crise du coronavirus : la croisière est à l’arrêt ou presque au niveau mondial. Gustavia devra se passer des croisiéristes, au moins jusqu’en 2021. L’an dernier 126.000 vacanciers avaient débarqué de l’un de ces bateaux.
La croisière, c’est compliqué. Les images de ces bateaux errant en mer, refusés port après port, sont encore fraîches. Et au-delà de l’hypothétique envie de la clientèle, les législations se superposent et restent très frileuses. Encore plus avec la seconde vague de Covid en Europe, et la situation sanitaire et politique aux Etats-Unis. Dans les ports de France, les bateaux sont autorisés uniquement dans le cadre d’un parcours 100% français. Insuffisant dans la Caraïbe, où les îles-nations ont chacune fixé leurs propres règles pour les bateaux de croisière –quand les ports sont rouverts. Aux Etats-Unis, gros pourvoyeur de paquebots dans la Caraïbe, le CDC (Center for Disease Control and Prevention) demande à tous les bateaux de rester à quai jusqu’au 31 octobre, une interdiction qu’il envisage de prolonger jusqu’en février 2021. Les négociations en cours entre les compagnies et la Maison Blanche ont été interrompues par la contamination de Donald Trump, et à quelques jours de l’élection présidentielle les Etats-Unis ont d’autres choses en tête.
L’année prochaine, peut-être
A Saint-Barthélemy Jérôme Montoya, agent maritime, organise les escales des paquebots. En 2019, 126.000 croisiéristes avaient débarqué à la gare maritime de Gustavia, et le premier bateau de la haute saison avait jeté l’ancre le 2 novembre. « Cette année, 190 escales étaient prévues. D’ici fin 2020, il en reste à peine une quinzaine, qui sont en attente de la décision des Etats-Unis. Je pense qu’on n’aura aucune escale en hiver 2020. Habituellement on en a 70 ou 80 entre le 15 octobre et le 31 décembre. »
Car même si l’autorisation tombait dans les jours qui viennent, il faut recruter du personnel, programmer et vendre les séjours, traverser l’Atlantique pour les bateaux européens, fixer des protocoles en accord avec chaque port… Que se passe-t-il si un ou plusieurs malades se trouvent à bord ? Si les ports ferment leurs portes du jour au lendemain, comme au mois de mars ? Toutes ces questions pour le moment ne sont pas tranchées et les compagnies de croisière sont donc encore dans l’expectative.
En Europe, les passagers de bateaux n’ont pas le droit de mettre pied à terre hors du cadre d’une excursion encadrée, pour éviter tout contact avec la population locale. La semaine dernière, un croisièriste qui avait quitté son groupe lors d’une escale en Italie a été interdit de retourner à bord du navire. Limiter les escales à des excursions “fermées”, ce sera en tout cas difficile à appliquer à la petite gare maritime de Saint-Barthélemy. Les petits volumes de croisiéristes ont pour habitude d’y débarquer pour prendre un taxi ou visiter la ville et les commerces de Gustavia, en toute liberté.
Pas de bateau à l’horizon avant 2021, donc. A Saint-Barth ils proviennent pour moitié des Etats-Unis, pour moitié d’Europe. Le doute plane sur les seconds, qui calculeront la rentabilité d’envoyer leurs bateaux de l’autre côté de l’Atlantique pour trois mois d’activité à jauge réduite. Ils sont suspendus à l’évolution de la situation sanitaire dans les mois qui viennent. Reste les paquebots américains, qui amènent davantage de monde sur notre île. Aujourd’hui le CDC recommande aux étatsuniens de reporter tout projet de croisière, où que ce soit dans le monde. Il considère que le risque de transmission du virus à bord d’un bateau à passagers est élevé.