Alors que l’Ajoe fête cette année ses 50 ans, son premier président, Julien Brin, revient sur la genèse de cette association autrefois nommée « Le club de loisirs des jeunes lorientais ».
Julien Brin a tout préparé. Sa casquette sur la tête, il s’assoit avec précaution sur son siège en bois, et sort une feuille de papier. Sur celle-ci, l’octogénaire a écrit à la main la genèse de l’Ajoe. Une écriture vacillante mais linéaire, raconte en trois points la naissance de l’association, il y a 50 ans. En 1973, Julien Brin est âgé de 30 ans. Il revient à Saint-Barth après quelques années passées à Saint-Thomas, et en Bretagne, à Dinant, pour son service militaire. Le curé de la paroisse, le Père Bellec, lui demande alors avec « insistance » d’encadrer le « club de loisirs des jeunes Lorientais ». « Tous les jours, pendant un mois, il venait m’embêtait pour me dire qu’il m’avait choisi avec le Saint Esprit, raconte Julien Brin. J’ai fini par accepter pour m’en débarrasser. » Julien Brin devient le responsable général de ce club de loisirs, d’où son surnom donné par les soeurs : « Le général ».
Cinéma et volley-ball
A l’époque, ce club est seulement réservé aux garçons, et uniquement de Lorient. L’objectif est clairement d’occuper les jeunes oisifs. « Le père Bellec voulait que chaque quartier crée sa propre association », précise Julien Brin. Aux côtés de Jean-Claude Gréaux, Christian Giraud, Jean-Marie Laplace et Jean-Luc Gréaux, Julien Brin organise des activités dans la salle paroissiale de Lorient, une infrastructure qui correspond désormais à l’emplacement de l’école Saint-Joseph de Lorient. Au programme : ping-pong, jeux de cartes, dominos, jeux de société ou encore bibliothèque. Dès le départ, le cinéma était dans l’ADN de l’association. Plusieurs fois par semaine, le père Bellec projetait des films. Julien Brin s’occupait alors de visionner les pellicules envoyées depuis la Guadeloupe, avant de les projeter aux adolescents. « Une fois, j’ai dû couper le son et l’image, c’était pas pour des enfants de 12 ans », retrace Julien Brin. A l’extérieur, seul le volley-ball se pratiquait. « Il y avait très peu d’infrastructures pour pratiquer des sports, c’est pour ça qu’on a tenu à inscrire « initiation au sport » dans les statuts de l’association », explique le premier président. Une quarantaine de personnes profitaient de ces occupations proposées le mercredi après-midi, le samedi et le dimanche.
Déclaration officielle le 11 octobre 1974
Mais très vite, le départ de trois des animateurs pour poursuivre leur formation professionnelle dans l’Hexagone plonge Julien Brin dans le doute. A seulement deux, il est difficile de tenir autant d’activités. « Jean-Marie me disait qu’il ne fallait pas laisser tomber, sourit Julien Brin. Je lui ai dit, d’accord, mais il faut recruter de jeunes responsables pour nous épauler. » Julien Brin voit plus loin qu’un club de loisirs, il veut restructurer totalement l’association. Avec une toute nouvelle équipe, l’Association des jeunes ouvriers et étudiants de Saint-Barthélemy est née. « Je ne voulais pas de ce nom », glisse Julien Brin. Pour cause, cette dénomination proposée par Jean-René Laplace fait des émules. Certains voient derrière l’appellation « ouvriers », un dessein politique. Mais il n’en est rien. Dans les statuts juridiques de l’Ajoe, déclarée officiellement le 11 octobre 1974, l’association est inscrite comme ayant pour but : «L’aide au développement et à l’épanouissement physique, moral, culturel et intellectuel des jeunes dans un cadre sain et amical. »
« La joie des gamins »
« J’ai passé des nuits à essayer de rédiger les statuts qui pouvaient convenir à la nouvelle association que je voulais mettre sur pieds », raconte le premier président. Dans un placard, le retraité garde précieusement les premiers statuts de l’association qu’il surnomme «Ma Poulette ». Parmi les feuilles jaunies par le temps, Julien Brin feuillette un vieux bloc-notes. On y aperçoit une ancre de marin dessinée à la main, un coucher de soleil ou un oiseau. Ce sont les propositions de logos pour l’association. « Le coucher de soleil avait eu 35 points, mais l’ancre 40 points », précise Julien Brin avant de ranger pudiquement le carnet. Cinquante ans plus tard, le retraité garde en souvenir « la joie des gamins » : « On leur apportait un petit truc, pas grand-chose mais quand même. » En prévision de la fête des 50 ans de l’Ajoe, Julien Brin prépare déjà son discours. « C’est seulement, si on me demande un petit mot », avance-t-il timidement, rempli de fierté que l’association ait perduré dans le temps. A la question, « qu’est-ce que l’Ajoe représente pour vous », Julien Brin répond cette fois avec assurance : « Mon testament ».
Programme de la fête des quartier du vent Vendredi 11 octobre sur le plateau de l’Ajoe : Buvette et restauration sur place Samedi 12 octobre sur le plateau de l’Ajoe : Buvette et restauration sur place Dimanche 13 octobre |
Premiers statuts de l’Ajoe
Julien Brin a conservé précieusement les premiers statuts juridiques de l’Association. Sur ce document on peut retrouver de nombreuses informations comme son emblème : « L’ancre de Marine », toujours d’actualité. Mais aussi sa devise, « Unis nous parviendrons », ou son hymne, « Mélodie, enfants de tous pays ». Dans les objectifs de l’association sont notamment listés : la projection de films, de séances théâtrales et récréatives, l’initiation et la pratique du sport, l’organisation de campings, de pique-nique, de voyages organisés ou même de « surprises-parties ». On peut aussi y lire, qu’à l’époque, l’adhésion était réservée aux personnes âgées de 12 minimum à 35 ans maximum, pour un montant de 10 francs.