Grâce à l’appui de ses anciens colistiers et des élus d’opposition de Saint-Barth d’Abord, Marie-Hélène Bernier a obtenu, lors du conseil territorial du 11 avril, la protection fonctionnelle qu’elle réclamait depuis quatre mois.
Dans une ambiance délétère, Marie-Hélène Bernier a obtenu gain de cause. Jeudi 11 avril, lors d’une réunion du conseil territorial des plus agitées, la première vice-présidente s’est vu accorder la protection fonctionnelle qu’elle réclamait, sans succès, auprès du président Xavier Lédée depuis le 16 janvier. Un vote favorable qui n’a été possible qu’en raison du ralliement des six élus du groupe d’opposition Saint-Barth d’Abord aux côtés de Marie-Hélène Bernier. Ainsi, pendant toute la durée de la séance, le président Lédée a été bousculé par un renversement de la majorité.
La première vice-présidente n’a pas assisté aux débats. Étant la principale concernée, elle ne pouvait être présente dans la salle des délibérations. Ainsi n’a-t-elle pu observer la sénatrice Micheline Jacques et le président de la commission Éducation, Francius Matignon, opposer une féroce répartie à Xavier Lédée. Car c’est avec véhémence que les deux conseillers territoriaux de Saint-Barth d’Abord ont lancé les débats.
Micros coupés
Dans un premier temps, Micheline Jacques et Francius Matignon ont tenté d’introduire d’autres sujets de discussion avant que ne soit abordée la seule délibération inscrite à l’ordre du jour. De vifs échanges ont alors éclatés entre Xavier Lédée, qui a rappelé que les questions doivent être adressées par écrit et en amont de la séance, et Francius Matignon qui a refusé de céder aux injonctions à se taire formulées par le président. Au point que celui-ci, excédé de ne pouvoir imposer son autorité et après avoir menacé l’élu de lui « interdire la parole », lui a purement et simplement coupé son micro. Il n’en pas fallu plus pour que le mot « dictature » ne soit prononcé par les deux conseillers d’opposition. « Nous ne sommes pas en dictature, il y a juste un règlement qui s’applique », a rétorqué Xavier Lédée. Ce qui n’a pas calmé ses contradicteurs.
Malgré d’autres interruptions, la délibération sur la demande de protection fonctionnelle de Marie-Hélène Bernier a enfin pu être abordée. Pour mémoire, elle a été adressée au président de la Collectivité le 16 janvier. Ce, pour permettre à la première vice-présidente de bénéficier d’une aide financière afin d’assurer sa défense dans le cadre de l’enquête administrative confiée par le président Lédée au Centre de gestion administrative de Guadeloupe.
Celle-ci avait pour but de déterminer si Marie-Hélène Bernier s’était rendue coupable de harcèlement moral envers son collaborateur de cabinet. Fin mars, après deux séjours à Saint-Barth et l’audition d’une vingtaine d’agents et d’élus de la Collectivité, les deux avocates guadeloupéennes et le magistrat lyonnais chargés de l’enquête ont considéré que les faits rapportés ne caractérisaient pas un harcèlement moral.
Refus du président
Quelques semaines avant, le 4 mars, Xavier Lédée avait répondu au courrier du 16 janvier de Marie-Hélène Bernier. Il lui indiquait alors que sa demande de protection fonctionnelle était prématurée car une enquête administrative n’implique pas le déclenchement d’une procédure pénale. Pourtant, fin décembre, c’est bien en raison de l’éventualité de poursuites pénales que le président de la Collectivité a retiré de manière « préventive » les délégations de pouvoir « police et sécurité » à sa première vice-présidente.
Marie-Hélène Bernier décide alors de réunir les signatures de ses six anciens colistiers et obtient celles des six élus de l’opposition. Elle peut alors contraindre le président à convoquer un conseil territorial. Celui du 11 avril.
Onze amendements
Onze amendements sont déposés en amont du vote. Un par Maxime Desouches, quatrième vice-président, qui est écarté car irrecevable. Dix par Romaric Magras, chef de file de Saint-Barth d’Abord. Chaque amendement précise les étapes de « l’affaire » et de la procédure. Ils évoquent notamment une «enquête administrative facultative », le fait que les éléments reprochés à la première vice-présidente sont susceptibles « de relever du délit de dénonciation calomnieuse », ou qu’en plus d’avoir été contrainte de s’attacher les services d’un avocat, Marie-Hélène Bernier a dû faire l’objet d’un suivi médical, «conséquence du stress induit par une telle procédure et des accusations portées ».
Quatre élus de la majorité (Caroline Maurel, Olivier Gréaux, Mélissa Lake et Fabrice Querrard) ayant demandés un vote à bulletins secrets, chaque conseiller a dû glisser à onze reprises un bulletin dans une urne. Après s’être isolé onze fois dans la cuisine attenante à la salle du conseil. Tous les amendements ont été adoptés à la majorité. La délibération également, avec douze voix « pour » et six voix «contre». Et c’est sous les applaudissements du public que Marie-Hélène Bernier a regagné son siège. Dans une atmosphère plus tendue que jamais.
Xavier Lédée: « Je ne vois pas un blocage uniquement idéologique » Après avoir retiré à Marie-Hélène Bernier sa délégation de pouvoir « police et sécurité » en raison d’une « rupture de confiance », le président de la Collectivité confirme avoir l’intention de priver également sa première vice-présidente des délégations « éducation » et « santé ». Si Xavier Lédée affirme que «l’arrêté n’est pas encore signé », il précise : « Je ne sais pas, au-delà du vote du budget, quelle personne est capable de défendre avec tout son cœur un projet auquel elle ne croit pas. Je rappelle que les délégations sont quelque chose d’administratif, qu’il y a des commissions de travail et un ensemble de choses. La délégation a, avant tout, vocation à représenter le président et à être un relais entre le président et les commissions. Aujourd’hui, c’est compliqué d’avoir un relai qui ne croit pas aux projets et qui l’exprime ouvertement. » Francius Matignon à l’éducation ? « Je discute avec tout le monde » « Je ne suis pas un garant de la morale » « Elle est libre de démissionner » |