Le conseil territorial de lundi a été bouclé en moins d’une heure, malgré l’ouverture d’un sujet d’importance, qui risque d’animer les débats pendant de longs mois à venir : le PPRN (plan de prévention des risques naturels).
Derrière cet acronyme barbare se cache un document de la plus haute importance. Le PPRN, plan de prévention des risques naturels prévisibles, définit les zones inondables, sujettes aux aléas sismiques, aux éboulements de rocher... Donc les normes de construction adaptées, selon les zones. Et par ricochet, la valeur des terrains et le coût des assurances.
La délibération votée lundi soir concerne l’élaboration par la Collectivité de ce document. « C’est une formalité obligatoire, d’autant plus après le passage de l’ouragan », explique Bruno Magras en introduction. Ernest Magras, conseiller territorial de la majorité, tient à mettre en garde l’assemblée : « En tant qu’élu sensible aux problèmes de sécurité, mais aussi à ce que l’île soit accessible aux générations futures, je pense qu’il ne faut pas se précipiter et adopter des mesures qui seraient très contraignantes. Les anciens savaient s’adapter au profil accidenté de cette île», rappelle-t-il. Appel à la mesure partagé par le Président, qui souligne toutefois que ce document est nécessaire « pour que par la suite, les autorisations de construire soient délivrées en connaissance de cause. » Car si la Collectivité autorise une construction inadaptée dans une zone qu’elle sait dangereuse, on pourra se retourner contre elle.
« Nous avons une densité de population importante », poursuit Bruno Magras. « L’objectif aujourd’hui n’est pas de développer l’île mais d’améliorer l’existant. » Tout en priorisant la manne économique de Saint-Barth, le tourisme. « Il ne faut pas s’imaginer que parce qu’il y a eu des vagues à droite ou à gauche, on ne va plus construire sur les plages. Si on fait ça, on n’aura plus de touristes. »
Si tout le monde est d’accord sur l’importance de ce PPRN, Maxime Desouches, élu d’opposition (Saint-Barth Autrement), s’interroge sur cette délibération. En effet, la préfecture a publié en 2007 un arrêté similaire à cette dernière, qui serait toujours valable, selon lui. « Entre les deux arrêtés, il y a très peu de différences», s’étonne l’élu. D’autant plus qu’après l’arrêté préfectoral de 2007, des réunions publiques se sont tenues sur l’île, et la DDE Guadeloupe (Direction départementale de l’équipement) a fini par élaborer une ébauche du PPRN. Un document jugé insatisfaisant par le président de la Collectivité. Depuis le 1er janvier 2008, celle-ci a récupéré cette compétence. En même temps, le PPRN relève aussi de la sécurité, compétence de l’Etat.
Le représentant de la préfecture à Saint-Barthélemy, Olivier Basset, l’assure : « On travaille en collaboration, notamment pour toute la partie technique. »
« Il va falloir que le projet que l’on présentera aux élus ne ressemble pas à celui qui avait été présenté à distance par les ingénieurs de la DDE à l’époque, auquel on n’a jamais donné suite, car il n’était tout simplement pas recevable », rappelle Bruno Magras. Son directeur de cabinet, Thierry Aron, nous précise : « Les ravines étaient mal positionnées, il ne correspondait pas du tout à la réalité de l’île… Entre-temps, nous avons adopté un code de l’environnement et la carte de l’urbanisme. Nous relançons le PPRN sur cette base. »
Il est à noter que des dispositions sont fixées dans le code de l’urbanisme actuel. « L’absence de PPRN n’empêche pas de prendre en compte la connaissance d’un risque dans la délivrance d’un permis de construire », précise Thierry Aron. « Mais le PPRN sera beaucoup plus détaillé, avec un zonage, et des conditions précises selon chaque zone. »
« Ce qui est contestable, c’est que l’arrêté de la préfecture en 2007 est passé à la trappe», estime Maxime Desouches. «Le PPRN réalisé à l’époque par la préfecture n’a jamais été soumis aux élus avant d’être retoqué. Et dans la délibération de lundi, à aucun moment il n’est fait mention du travail effectué en 2007 par la préfecture. On part comme si on était vierge. Pourquoi on n’a pas sorti de PPRN depuis 2007 ? Qu’on me donne une réponse, parce qu’il y a baleine sous caillou... »
Il y a fort à parier que ce débat n’est que le premier d’une longue série. En effet, la délibération de lundi, adoptée à la majorité, portait simplement sur les modalités de concertation lors de l’élaboration du PPRN. C’est à dire que les citoyens, associations ou entreprises peuvent, dès aujourd’hui, donner leur avis sur le projet dans des registres publics disponibles à la Collectivité.