Reconstruire le quai Rockefeller, y délocaliser les pêcheurs, les plongeurs et la SNSM, pour construire les sanitaires à la place de l’actuelle halle aux poissons, et enfin réinstaller l’office du tourisme là où il était avant Irma, avec l’ATE, dans un bâtiment plus grand. Le projet imaginé par Elodie Laplace a animé la discussion avant d’être validé.
En décembre 2017, la Com déboursait 10,2 millions d’euros pour acheter le quai Rockefeller et deux parcelles qui l’entourent, pour un total de 2.000 m2 sur le port. Un lieu stratégique où Bruno Magras souhaite installer les marins pêcheurs, les clubs de plongée et la SNSM, en construisant un petit bâtiment accueillant une halle aux poissons avec tous les équipements nécessaires, un lieu de stockage pour le matériel de la SNSM et un local que la Collectivité louerait aux clubs de plongée. Ces derniers en quittant le quai de la Collectivité libéreraient de l’espace de stationnement sur le parking de cette dernière, saturé.
Les pêcheurs sont partants (leurs bateaux seraient mieux protégés des effets de houle dans le port), mais certains élus craignent les effets sur la circulation routière. « On va générer plus de circulation sur la rive sud, mais ce sera plus fluide sur la rive nord, à l’entrée de ville », assure le président, anticipant la remarque. Cela ne rassure pas Maxime Desouches (Saint-Barth Autrement) : « Aujourd’hui, les gens qui viennent acheter leur poisson n’ont pas besoin d’entrer dans la ville. » « Depuis deux ans qu’on a acheté ce terrain, n’aurait-il pas fallu réaliser une étude pour évaluer l’impact sur la circulation ? » s’enquiert Xavier Lédée (Unis pour Saint-Barthélemy). « J’adore les études mais si on passe notre temps à faire des études, on n’avance plus », rétorque Bruno Magras. « Je ne parle pas de faire appel à un cabinet extérieur, je pense que nous avons au sein de la Collectivité des gens compétents pour réaliser ce type d’étude », précise Xavier Lédée.
Pas de poisson à la cantine
Micheline Jacques rappelle qu’une autre étude avait été présentée à l’occasion des Assises de l’environnement, il y a un an, sur le développement de l’activité pêche à Saint-Barth. « Aujourd’hui, il y a des problèmes sur le transfert du poisson aux bateaux qui le ramène en Guadeloupe ; la cantine ne peut pas servir de poisson frais aux enfants ni à l’Ehpad car il n’y a pas de traçabilité », regrette-t-elle. Pour la vice-présidente, l’aménagement d’un nouveau lieu pour les pêcheurs pourrait permettre de résoudre ces problématiques.
« Je souhaiterais que l’on conserve la structure en T du quai, qui me semble judicieuse », intervient Ernest Magras. « Les pêcheurs sont très sensibles à l’idée d’y mettre leurs bateaux pour les protéger de la houle ; ils sont aussi favorables à la construction d’un pan incliné pour les sortir de l’eau en cas de problème », poursuit l’élu Saint-Barth D’Abord. « Le quai Rockefeller est le lieu le plus sécurisé, sur le port, pour construire. Je serai favorable à l’idée d’un bâtiment sur deux niveaux, avec en bas les plongeurs et les pêcheurs, et en haut l’ATE et les Affaires maritimes. Et pourquoi pas un point de débarquement d’une navette maritime qui desservirait deux ou trois points dans le port, voire à Public… » « On ne pourra pas tout faire », prévient Bruno Magras. « L’objectif n’est pas de faire un chantier naval à cet endroit. Un bâtiment à étage, ce serait contraire à la carte d’urbanisme. Le quai en T pose problème pour la manœuvrabilité des bateaux… Je suis partisan d’inscrire au budget 2020 la reconstruction du quai, et la construction de la halle viendra ensuite. » Cette première partie est adoptée, avec deux abstentions (Xavier Lédée et Bettina Cointre).
Des WC et du glamour
Second volet du projet, porté par la conseillère territoriale Elodie Laplace qui est à l’origine de l’idée. Il s’agit de reconstruire les locaux pré-Irma du CTTSB, au bout du parking de la République. Avec un agrandissement sur les jardinières voisines et en supprimant des douches, l’ATE ayant aussi besoin d’espace supplémentaire. Les sanitaires seraient alors aménagés à la place de l’actuelle halle aux poissons, en face de la pharmacie de Gustavia. Des douches et toilettes dédiées aux habitants des bateaux qui seraient accessibles grâce à une carte délivrée par le port. Un bloc WC serait conservé à côté de la capitainerie. « Pour travailler tous les jours sur ce parking à l’entrée de Gustavia, la circulation est déjà très difficile à gérer pour tous les usagers », indique Hélène Bernier, élue Saint-Barth Autrement qui exerce la profession de taxi. « Mais ils viendront en annexe, ce sont des sanitaires réservés aux habitants des bateaux », précise Elodie Laplace. « On parle de circulation routière pour aller au WC ? » questionne goguenard le Président. « Nous aurions donc deux jeux de toilettes ? » interroge Maxime Desouches. « Des WC à l’entrée de Gustavia, est-ce qu’il n’y a pas quelque chose de plus glamour ? » ironise Bettina Cointre (Tous pour Saint-Barth). Et Ernest Magras d’expliquer qu’il verrait plutôt cet espace « réservé aux professionnels du transports, avec pourquoi pas un parking relais ; ce doit être un espace clé de la mobilité », indique cet autre conducteur de taxi. Qui a aussi un coup de gueule à passer : « Je ne suis pas d’accord avec le fait que trois personnes se réunissent et nous disent ce qu’on doit faire pour Gustavia. » « Je suis d’accord. Sur ce type de projet, ce serait intéressant de se voir en commission générale », renchérit Bettina Cointre : « A chaque fois on a un projet clé en main qui nous est présenté, on nous explique que c’est le meilleur, et on nous demande de valider ou non… » « Je ne suis pas pour la réunionnite », réplique Bruno Magras. Le second volet du projet est soumis au vote et adopté, malgré deux voix contre (Hélène Bernier et Maxime Desouches) et deux abstentions (Xavier Lédée et Bettina Cointre).
Et l’ancienne mairie ?
Il y a quelques mois, les élus validaient le projet de reconstruction à l’identique de l’ancienne mairie, rue du Roi-Oscar-II, des locaux qui devaient être occupés par l’office du tourisme (ce qui n’avait pas enchanté l’ensemble des élus). Finalement, remettre ce dernier sur le port a été jugé plus pertinent. Il avait aussi été question que les trois salariés du CTTSB quittent leur minuscule local de la rue Samuel-Fahlberg pour s’installer provisoirement au Brigantin, en attendant les travaux de leurs bureaux définitifs. Cette idée semble aussi avoir été laissée de côté, la majorité jugeant que le bâtiment d’époque suèdoise était trop éloigné de l’hypercentre de Gustavia et que les touristes auraient du mal à marcher jusque-là pour le trouver. La reconstruction de l’ancienne mairie n’est pas annulée, mais le bâtiment historique trouvera une autre destination. Bruno Magras a aussi glissé au conseil territorial que des logements pourraient être bâtis sur la partie arrière du terrain.