Entre la séance du Conseil territorial au cours de laquelle le budget primitif a été voté et la réunion du 29 juin, trois mois se sont écoulés. Un délai des plus inhabituels. Tout comme celui qui aura séparé les 6h22 de débats du 29 juin des échanges qui vont se tenir ce jeudi à partir de 17 heures en l’hôtel de la Collectivité. En effet, à peine quinze jours après l’interminable séance aux 23 délibérations, les élus se réunissent à nouveau. Cette fois, seules trois délibérations sont inscrites à l’ordre du jour. Mais pas les plus anecdotiques. De fait, toutes sont consacrées à des questions d’urbanisme. Plus précisément, à la révision de la carte d’urbanisme et à la modification du code général de l’urbanisme, de l’habitation et de la construction ainsi que celui relatif aux établissements recevant du public. Inutile de préciser que le contenu de ces délibérations ainsi que les votes qui les entérineront sont très attendus par toutes les personnes impliquées de près ou de loin dans le secteur de l’immobilier.
Limiter les constructions nouvelles
Dans un premier temps, les conseillers territoriaux vont examiner un « plan d’urgence en vue de pallier la crise du logement » auquel s’ajoute la mise en révision de la carte de l’urbanisme. « Le rapide développement de l’île depuis la fin des années 90 et l’absence de document d’urbanisme suffisamment contraignant, ont permis sur les 15 dernières années la construction de 1660 projets, est-il précisé dans le projet de délibération. Depuis 2018, les nouveaux permis de construction à destination de locations saisonnières représentent en moyenne plus de 30 % des constructions sur les 4 dernières années. » Pour résumer, l’objectif de cette délibération est de donner pour mission à la commission d’urbanisme d’élaborer et de proposer un projet comprenant des dispositions réglementaires, dans un délai de deux ans, visant à pallier le manque de résidences principales, à limiter la création d’hôtels et de résidences touristiques et à limiter les constructions nouvelles, les changements d’affectation ou les agrandissements de constructions existantes.
De plus, il s’agit de conférer au Conseil exécutif un pouvoir de « sursoir à statuer » effectif sur toute demande de permis de construire, de permis d’aménager ou de démolir qui aurait pour effet de supprimer une résidence principale, de construire des résidences secondaires, des hébergements touristiques, hôteliers, ou qui contribuerait « par l’importance des travaux générés, par les activités prévues et les emplois saisonniers qu’il implique » de participer de « la saturation de l’île » et de « l’aggravation de la crise du logement ».
« Eviter toute ambiguïté »
Deuxième point, la modification du code de l’urbanisme, de la construction et de l’habitation, principalement pour les établissements recevant du public. « Lorsqu’un établissement recevant du public est ouvert dans un bâtiment existant, précise la délibération, la procédure d’autorisation d’ouverture définie par le code de la construction et de l’habitation ne prévoit pas de contrôler le fait que le local d’implantation a bien fait l’objet des autorisations d’urbanisme exigées par le code de l’urbanisme, de l’habitation et de la construction.» Par conséquent, la Collectivité craint que cette absence de contrôle ne puisse entraîner une « consolidation de la situation des constructions édifiées sans permis ». Il va donc être proposé aux élus de stipuler dans le code qu’un établissement recevant du public ne peut être autorisé dans un bâtiment existant « que si le demandeur justifie que ce bâtiment a bien bénéficié des autorisations requises ».
Enfin, une proposition de modification de l’article 114-4 du code de l’urbanisme. Il s’agit de rappeler que la carte d’urbanisme de Saint-Barth telle qu’elle est conçue actuellement et depuis la jurisprudence du Conseil d’Etat en 1986, permet à certaines catégories de constructions (restaurants et bâtisses légères en bord de mer, par exemple) de bénéficier de règles particulières. « Pour éviter toute ambiguïté, il parait nécessaire de préciser explicitement que la carte d’urbanisme peut, dans un intérêt général, fixer des règles différenciées pour des catégories de constructions qu’elle définit elle-même », est-il précisé dans la délibération.
Une réunion qui pourrait s’avérer des plus courtes puisque chacune des listes candidates aux élections territoriales de mars 2022, désormais représentées au sein du Conseil, avaient exprimé la volonté de freiner l’expansion immobilière sur l’île. A vérifier en séance.
Une procédure pour annuler le vote de rejet sur l’achat des Résidences de Saint-Barth ? Lors du Conseil territorial du jeudi 29 juin, de vifs échanges ont rythmé l’examen du 23e et dernier point de l’ordre du jour. Il s’agissait de l’achat de douze des vingt logements que compte les Résidences de Saint-Barth, à Petit-Cul-de-Sac, pour la somme de 22,5 millions d’euros. Après un débat contradictoire, dix élus ont choisi de voter contre ce projet d’acquisition : les six conseillers d’opposition et quatre de la majorité territoriale (Marie-Hélène Bernier, Maxime Desouches, Pascale Minarro-Baudoin et David Blanchard). Une autre, Bettina Cointre, s’est abstenue. Comme chaque délibération, celle-ci peut faire l’objet d’un recours devant le tribunal administratif dans un délai de deux mois. Elle peut aussi être signalée auprès du préfet qui assure le contrôle de légalité des actes administratifs. Or, une demande de procédure en vue de l’annulation de la délibération a bien été réclamée en préfecture. Elle s’appuierait sur le fait que deux élues qui ont voté contre l’acquisition travaillent ou ont travaillé dans des agences immobilières, dont une qui est directement concernée par l’achat des logements. Pour l'heure, toutefois, aucune procédure n'a été enclenchée. Affaire à suivre. L’opposition interroge, la présidence réplique Comme le groupe d’opposition Saint-Barth d’Abord a pris l’habitude de le faire, il a adressé plusieurs questions au président de la Collectivité en amont de la réunion du Conseil territorial. L’une d’entre elles, rédigée par Alexandra Questel, porte sur « la progression » du « nombre de personnes sans-abris ». Elle mentionne « des inquiétudes parmi les visiteurs, la population et les professionnels du tourisme » ainsi que des incidents, notamment sur la plage de Saint-Jean, qui ont nécessité « des interventions multiples de la gendarmerie ». Par conséquent, elle interroge le président Lédée sur les actions menées pour résoudre ce problème et les résultats enregistrés. Deux jours plus tard, en l’occurrence hier, mercredi 12 juillet, un arrêté territorial portant sur l’interdiction « du camping et du bivouac » sur le domaine public est pris par la présidence et publié en ligne. Une mesure qui semble répondre directement à la question posée par l’élue d’opposition puisqu’il rappelle également l’interdiction « d’occupation privative des plages ». |