Saint-Barth - CT cem batiment gustavia

Les élus ont rejeté la proposition d’acquisition de la parcelle sur laquelle se trouvent les anciens locaux de la Cem, à Gustavia.

Conseil territorial : Des débats apaisés mais discordants

Pas un mot plus haut que l’autre. Lors de la dernière réunion du conseil territorial de l’année, le vendredi 20 décembre en l’hôtel de la Collectivité, les propos des élus ont été mesurés lors de chaque intervention. Sans doute l’effet des deux séminaires financés et organisés par la présidence afin de dispenser une instruction de « bon élu » aux conseillers territoriaux, dont un s’est tenu la veille de la séance. Après plus de deux années de gouvernance marquées par une déliquescence progressive des relations entre les élus mais aussi avec une partie des services territoriaux, travailler sur la forme ne permettra sans doute pas de sauver le fond. De fait, même si aucun éclat de voix n’est venu perturber la bonne tenue des débats lors de la réunion du 20 décembre, les discordances étaient une fois encore à l’ordre du jour. Sur un ton plus posé, pour le moment.
L’ordre du jour proposé aux conseillers était relativement dense. Quinze délibérations ont été examinées avec, dans la majorité, sérénité. Ainsi, les six premiers points soumis au vote des élus (sur le temps de travail, le régime indemnitaire, le plan de formation, une modification budgétaire ou encore le schéma numérique, etc) ont été approuvés à l’unanimité. La modification du code de l’énergie relative au régime d’aide au développement des énergies renouvelables (dispositif d’aides financières à l’installation de panneaux photovoltaïques) a nécessité quelques explications mais a été approuvé. Il en a été de même pour la mise en place d’une prime pour les véhicules électriques. En revanche, d’autres dossiers ont été l’objet de discussions plus approfondies.

L’achat des anciens locaux de la Cem rejeté
Pour exemple, la proposition d’achat pour huit millions d’euros de la parcelle sur laquelle sont érigés deux bâtiments, à Gustavia, en face du bureau de la Poste. L’une des structures abritait les bureaux de la Cem (Chambre économique multiprofessionnelle) avant son déménagement au Centre Elvina, à Saint-Jean. L’autre, une société immobilière. «Un dossier qui traîne », a souligné le président de la Collectivité, précisant que l’ancien bâtiment de la Cem n’est pas « classé ». La première vice-présidente, Marie-Hélène Bernier, remarque que le prix de vente est « très cher » et qu’aucune place de parking n’est attribué à cet espace. Troisième vice-présidente, Bettina Cointre se dit « partagée » en évoquant aussi le prix de vente élevé, le manque d’accessibilité ainsi que la question du bail qui court sur neuf ans. « Ça veut dire qu’une partie du bâtiment ne pourra pas être exploitée pendant un certain temps », précise-t-elle. Pour Dimitri Lédée, si le prix de vente est « trop cher », « le vendeur trouvera de toute façon un acquéreur ». Par conséquent, il suggère que cet acheteur soit la Collectivité plutôt qu’un particulier ou une entreprise. « Effectivement, ce bâtiment a un certain cachet, poursuit Francius Matignon pour le groupe Saint-Barth d’Abord. Mais on ne peut pas acheter à n’importe quel prix. Il faut rediscuter avec le propriétaire et savoir s’il peut faire un effort. » Le président de la Collectivité déclare alors : « Je crois qu’il y avait eu une offre à dix millions. » Rien qui ne soit confirmé de manière fiable, en somme. Deuxième vice-présidente, Marie-Angèle Aubin l’assure : « Le prix est élevé pais il ne faut pas la laisser nous échapper. » Alexandra Questel, conseillère territoriale pour Saint-Barth d’Abord, soulève la difficulté de cette transaction.
L’élue explique : « On est vraiment au-dessus du marché. Là, on est à près de 50.000 euros le mètre carré.» Quatrième vice-président, Maxime Desouches renchérit : « Avec cette acquisition, on validerait un prix au mètre carré qui ne serait pas avantageux. » Tandis que plusieurs élus regrettent qu’un tel dossier arrive en conseil territorial «sans avoir été débattu en conseil exécutif » ou dans une réunion organisée en amont de la séance, Alexandra Questel suggère de «reporter le point pour rediscuter avec le propriétaire ». Le président préfère aller au vote. Six voix favorables, deux abstentions et onze voix « contre » plus tard, la délibération est rejetée. Reste à espérer que le propriétaire n’a pas écouté les échanges entre les élus. Les hésitations de ces derniers, en direct et sur un dossier visiblement délicat, pourrait légitimement le pousser à vendre son bien à plus offrant. Et moins indécis.

Bricolage et manque de vision politique ?
L’acquisition de parcelle à Grand Fond pour 4,7 millions d’euros n’a pas soulevé de débat puisqu’elle a été votée à l’unanimité. En revanche, une énième révision de l’organigramme des services de la Collectivité a clairement agacé plusieurs élus. A commencer par la candidate aux élections législatives de juin dernier, Alexandra Questel. «Il faudrait un schéma global, une vision politique, pour éviter de revenir sans cesse sur cette délibération. » Pour sa part, Bettina Cointre «regrette qu’il n’y ait pas eu un temps de travail collectif sur l’organigramme » avant que ce dossier n’arrive en séance du conseil territorial. «Il y a quand même des points qui sont clairs », essaye de tempérer Rudi Laplace. Pas aux yeux de Dimitri Lédée, qui lance : «Je ne vois pas où on va avec cet organigramme. Par exemple, jamais je n’aurais imaginé quand j’ai travaillé sur le dossier de la nouvelle fourrière qu’elle serait confiée au service environnement. Idem pour le service de la main d’œuvre étrangère. Pourquoi ne sont-ils pas affiliés à la police territoriale ? » Pour apporter un élément de réponse, le président de la Collectivité fait appel à un intervenant extérieur présent dans la salle. Celui-ci explique qu’il existe « un risque de gestion de crise » si les policiers, qui verbalisent en premier lieu les véhicules, s’occupent également de la fourrière. Néanmoins, il assure : « Tous les cas de figure sont possibles. » Alexandra Questel et Bettina Cointre demandent que la délibération soit reportée à une prochaine réunion tandis que Maxime Desouches peste ouvertement : « On continue de bricoler. » Le vote a toutefois lieu et le point est adopté de justesse (9 votes « pour », 8 « contre » et 2 abstentions).

Reculade sur la CFAE
S’il est une marque de fabrique (bientôt déposée ?) de la mandature en cours, il s’agit sans nul doute du «rétropédalage » ou de la franche reculade sur des dossiers importants ou délicats. Ce, malgré l’évidente bonne volonté affichée par les conseillers territoriaux impliqués dans les travaux. Ainsi, après les dossiers du ramassage des déchets, du bâchage des bennes des camions, de la réglementation sur la restauration de plage pour les hôteliers ou encore, le plus emblématique, celui du projet de délocalisation des écoles, s’ajoute la CFAE (Contribution forfaitaire annuelle des entreprises).
Le 26 septembre dernier, les élus du conseil territorial ont adopté une modification du système de calcul de la part variable de la CFAE sur la base des effectifs salariés. Une évolution saluée par le Conseil économique, social, culturel et environnemental (CESCE) mais qui, visiblement mal expliquée aux professionnels, a soulevé parmi ces derniers quelques protestations. Le président de la Collectivité propose donc de « rester sur ce qui fonctionnait à l’origine ». Alexandra Questel remarque que « pas mal de professionnels n’ont, en effet, pas compris le fonctionnement » de cette modification de la CFAE. « On a voté un code et on revient en arrière, c’est dommage », regrette l’élue de Saint-Barth d’Abord.
Pour sa part, Maxime Desouches s’interroge sur le fait que « de nombreux points qui concernent le code des contributions ne sont toujours pas arrivés en conseil territorial ». Il cite notamment « deux questions sur deux établissements de Saint-Jean qui ne respectent pas les règles d’urbanisme ». Le président lui répond que ces dossiers sont en cours de traitement.